Gilles Duceppe refuse d'admettre que les conservateurs pourraient aller chercher une majorité à la Chambre des communes sans augmenter leur nombre de sièges au Québec. Le chef du Bloc québécois croit toujours être en mesure d'empêcher Stephen Harper d'obtenir un gouvernement majoritaire, mais estime que le reste du pays doit s'interroger.

«C'est aux Canadiens de juger de leurs intérêts, de leurs valeurs. Est-ce qu'ils se retrouvent dans Stephen Harper? S'ils ne se retrouvent pas dans Stephen Harper, qu'ils fassent en sorte de vaincre les candidats conservateurs», a lancé le leader souverainiste, hier, à Mirabel.

 

De plus en plus de sondages et de prédictions donnent une majorité aux troupes de M. Harper, sans que cela ne se traduise par une rafle conservatrice au Québec. Par exemple, la firme de consultants en communication Hill&Knowlton, qui fait des projections à partir de chaque sondage canadien, prédit dans sa dernière analyse 157 sièges aux conservateurs, 62 aux libéraux de Stéphane Dion, 41 au NPD de Jack Layton, un indépendant et 47 pour le Bloc, soit un de moins qu'au moment de dissoudre la chambre, le 7 septembre. Seuls 155 sièges sont nécessaires pour obtenir une majorité.

Cette donne vient quelque peu affaiblir le principal argument du chef bloquiste, qui a passé les trois premières semaines de sa campagne à marteler à tout rompre que son parti pouvait empêcher une majorité conservatrice.

Discours à Toronto

C'est aussi dans ce contexte que M. Duceppe ira, vendredi, livrer un discours anti-Harper à l'Economic Club de Toronto, lui qui ne présente des députés qu'au Québec.

Hier, le chef du Bloc a estimé que la «rupture» entre le Québec et Stephen Harper «s'accentue de jour en jour».

«Stephen Harper a affiché son mépris envers les artistes et artisans de la culture. Il s'est attaqué à la réhabilitation des jeunes délinquants, ce qui fait pourtant consensus au Québec», a rappelé M. Duceppe, dressant la liste des groupes dans la société qui selon lui craignent un gouvernement conservateur majoritaire, des étudiants aux associations de femmes, en passant par les producteurs agricoles et les travailleurs forestiers et manufacturiers «abandonnés à leur sort».

Jugeant que seul le Bloc défend les intérêts des Québécois, le chef s'est livré à une attaque en règle contre les 10 députés conservateurs élus dans la Belle Province en 2006.

«On les a vus s'écraser sur la langue de travail. On les a vus s'écraser sur le déséquilibre fiscal. On les voit s'écraser sur les jeunes contrevenants, sur les organismes à but non lucratif, sur la culture. Ils vivent à genoux ce monde-là», a critiqué M. Duceppe, de passage dans Argenteuil-Mirabel-Papineau, où l'organisateur en chef de la campagne du Bloc, Mario Laframboise, a obtenu aux deux derniers scrutins une majorité écrasante de 16 000 votes.

Le chef bloquiste a terminé sa journée à l'heure du dîner, après une visite au verger Jude Pomme, à Oka. Depuis plusieurs jours, le chef bloquiste a grandement ralenti le rythme de sa campagne électorale, en comparaison aux deux premières semaines, qui étaient passablement chargées.

Femmes de Laval

Aujourd'hui, M. Duceppe rencontrera des groupes de femmes dans la circonscription de Laval, en matinée, en compagnie de la candidate Nicole Demers.

Puis, il se concentrera à la préparation des débats des chefs, qui auront lieu mercredi et jeudi. «Le défi sera pour moi de démontrer aux Québécois, un enjeu à la fois, qu'il faut empêcher Stephen Harper d'obtenir une majorité», a dit M. Duceppe, qui a plus d'expérience en débats que tous les autres chefs qui y participeront.