Loin de se rétracter pour ses propos controversés concernant les jeunes contrevenants qui pourraient se retrouver victimes de prédateurs sexuels incarcérés, le chef du Bloc québécois en rajoute. Envoyer «les enfants en prison», c'est la «priorité» de Stephen Harper, a dit Gilles Duceppe hier.

Pour la troisième journée consécutive, le chef bloquiste a surfé sur la vague du mécontentement suscité au Québec par les mesures proposées par le chef conservateur pour durcir la loi sur les jeunes contrevenants, en particulier l'idée d'imposer des peines d'emprisonnement à vie à des délinquants de 14 ans-16 ans au Québec.

«D'un côté, il y a Stephen Harper qui a comme priorité d'envoyer les enfants en prison, à l'université du crime. De l'autre, il y a le Québec, qui veut envoyer les jeunes à l'université du savoir», a lancé M. Duceppe, dans un discours devant plus de 800 étudiants, à l'Université de Montréal.

«Stephen Harper veut imposer au Québec son idéologie rétrograde et dangereuse», a poursuivi le chef du Bloc, devant une foule visiblement déjà acquise à sa cause.

Mercredi, M. Duceppe avait affirmé que le chef conservateur s'apprêtait à envoyer, avec ce resserrement de la loi, «de la jeune chair» en prison, aux mains de possibles agresseurs.

Outré, M. Harper avait, en soirée, demandé au chef bloquiste de retirer ses propos, estimant qu'il avait dépassé les limites.

«Je ne retirerai pas mes paroles, j'ai raison», a rétorqué M. Duceppe, en matinée hier, en entrevue à Radio-Canada.

«On sait que malheureusement, en prison, il y a certaines choses qui se passent, on ne peut pas nier cela, à moins de faire semblant, de faire comme les trois petits singes, qui se ferment les yeux, se bouchent les oreilles et la bouche, a-t-il souligné. C'est dur, les prisons.»

Le chef du Bloc a cité l'article 76 de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, qui prévoit que les jeunes contrevenants «peuvent bel et bien se retrouver dans des prisons pour adultes».

Le chef conservateur a toutefois estimé, hier, que cette réforme des lois sur la criminalité n'aurait pas pour effet d'augmenter le nombre d'adolescents incarcérés dans des pénitenciers pour adultes.

«On parle de situations très rares et dans ces cas, on a besoin de pénalités appropriées, a souligné M. Harper, de passage à Victoria. Mais on ne propose pas d'avoir ce régime pour n'importe quel adolescent condamné pour un petit crime ou pour une bagarre. On parle de situations très sérieuses.»

Devant le refus de M. Duceppe de retirer ses propos, le chef conservateur a vivement réagi. «Je vois des déclarations fausses, extrêmes, démagogiques, intolérantes de M. Duceppe», a dit M. Harper, qui a déjà prévenu qu'il ferait de ces enjeux liés à la justice des votes de confiance à la Chambre des communes.

En entrevue à LCN, le candidat bloquiste Serge Ménard, a estimé que de parler d'agressions sexuelles possibles pour les jeunes contrevenants incarcérés avec des adultes n'avait pas été «le meilleur argument» du chef bloquiste.

En fin de soirée, le Parti conservateur a envoyé un communiqué pour critiquer à nouveau les propos de M. Duceppe et lui redemander de se rétracter.

Avec Hugo De Grandpré