D'anciens premiers ministres canadiens s'invitent dans la campagne électorale et déplorent avec vigueur l'inaction du pays en matière climatique. Avec une soixantaine d'autres personnalités canadiennes, les Martin, Clark, Turner et Campbell pressent Ottawa de se fixer une cible de réduction des gaz à effet de serre «beaucoup plus sérieuse».

Dans une lettre intitulée Changements climatiques: Il est temps d'agir, obtenue par La Presse, une impressionnante liste de signataires aux allures de «Who's Who» canadien exigent «des efforts bien plus grands que ceux consentis jusqu'à maintenant».La missive, qui suggère un objectif de réduction des émissions allant jusqu'à 80% d'ici 2050, a été signée par des gens aussi épars que les écrivains Margaret Atwood, Michael Ondaatje et Naomi Klein, les gens d'affaires Stephen R. Bronfman et Moses Znaimer, ainsi que d'anciens premiers ministres libéraux et conservateurs, Paul Martin, John Turner, Joe Clark et Kim Campbell.

«Si nous nous croisons les bras en attendant que les autres agissent, écrivent-ils d'une seule plume, les changements climatiques vont continuer à prendre de l'ampleur, nous allons perdre l'occasion d'élaborer nos propres solutions et nous aurons renié nos responsabilités envers le monde.»

Sans viser directement le gouvernement Harper, les signataires se permettent néanmoins, à mots à peine couverts, certaines attaques à son endroit. Ils déplorent, par exemple, sa volonté d'attendre que des réductions soient imposées à la Chine et aux États-Unis avant d'appuyer sans réserve un traité international qui succéderait à Kyoto.

Ils regrettent également qu'Ottawa n'ait toujours pas attribué un coût financier aux émissions de gaz à effet de serre, que ce soit par l'entremise d'une taxe ou d'un système d'échanges de droits de polluer. Cela dit, ils n'appuient pas directement l'idée d'une taxe sur le carbone, telle que promise par les libéraux de Stéphane Dion.

«De pareilles mesures permettent d'utiliser les forces du marché pour récompenser le leadership, l'innovation et les investissements qui entraînent des réductions des émissions», précisent-ils.

Outre les mesures fiscales, les signataires prônent «une nouvelle approche» basée sur l'effort de toute la société, l'implantation de technologies vertes, la simplification des politiques climatiques et surtout, l'action immédiate.

«Malgré des années de consultations et plusieurs générations de programmes gouvernementaux, les émissions de gaz à effet de serre du Canada n'ont pas diminué, mais ont plutôt augmenté de plus de 25% depuis 1990», notent-ils.

Or «pour éviter les conséquences les plus graves des changements climatiques», les émissions devront au contraire être réduites de plus de la moitié, voire de plus de 80% d'ici 2050.

Précisons que les cibles des différents partis s'appuient sur un horizon plus court que celui des signataires, soit 2020. Si l'on se base sur 1990, l'année de référence du protocole de Kyoto, le Parti libéral propose une réduction de 20%, le NPD et le Bloc de 25%, les verts de 30% et le Parti conservateur, de 3% (si l'on se fie aux calculs du Sierra Club).