La campagne électorale est loin d'être terminée, le Parti conservateur n'a pas encore dévoilé son programme électoral en bonne et due forme, mais, depuis vendredi déjà, des milliers de Canadiens estiment qu'ils en ont assez entendu pour arrêter leur choix. Le vote par anticipation connaît une croissance impressionnante depuis 10 ans. Les partis devront s'adapter à cette nouvelle réalité, croient des experts.

Samedi, 16h, le soleil invite à la randonnée en montagne, mais Michel Caron se dirige plutôt vers le sous-sol sombre d'une église du chemin de la Côte-Sainte-Catherine pour faire une croix devant le nom du candidat de son choix. Michel Caron sera à Montréal le 14 octobre. Il pourrait voter à la date prévue, comme la majorité de ses compatriotes. Mais il a plutôt adopté la maxime: «Pourquoi remettre à demain ce que l'on peut faire aujourd'hui?»

 

Depuis que les restrictions au vote par anticipation ont disparu, le nombre de Canadiens qui y ont recours a presque doublé. Il a passé de 3,6% à 6,8% entre 1997 et 2006, selon le Directeur général des élections.

Au Canada, ces données ne semblent pas encore avoir modifié les stratégies des partis politiques. «Ce serait toutefois une très bonne idée qu'ils commencent à le faire, vu l'ampleur qu'est en train de prendre le phénomène», signale le politologue Réjean Pelletier. Les partis qui ont le vent en poupe à mi-campagne devraient inciter leurs électeurs à se prononcer le plus tôt possible, dit-il, particulièrement dans les circonscriptions où la lutte s'annonce la plus chaude.

Même son de cloche du côté de François-Pierre Gingras, professeur à l'Université d'Ottawa, qui ajoute que les partis marginaux devraient être les plus sensibles au mouvement. «Les petits partis ne sont pas toujours bien connus au deux tiers de la campagne, et les gens qui votent par anticipation choisissent probablement les meneurs dans les sondages», prévient-il. Bref, plus les électeurs s'exprimeront hâtivement, plus les candidats d'arrière-plan auront du mal à s'imposer.

Aux États-Unis

Cette tendance suscite déjà beaucoup d'intérêt chez nos voisins du Sud, où les partis politiques ont commencé à modifier leurs plans de campagne électorale afin de mobiliser les électeurs avant le 4 novembre. Il faut dire que le taux de vote par anticipation y connaît une croissance encore plus rapide qu'ici. Il a bondi de 14% en 2000 à 20% en 2004, et il devrait atteindre les 30% cette année, selon le Los Angeles Times. Du coup, le mois d'octobre y a été surnommé le «mois des élections». «Les deux équipes doivent s'organiser très tôt, décider où et quand envoyer leur candidat et où consacrer des fonds à des spots télévisés», indique le quotidien californien.

Le Directeur général des élections dévoilera cette semaine le taux de participation aux trois journées de scrutin par anticipation (vendredi, hier et demain). Une nouvelle hausse est à prévoir. Un grand nombre de citoyens de confession juive auraient décidé de voter par anticipation puisque le 14 octobre coïncide avec le début de Soukot, la «fête des cabanes».

La dernière journée du vote par anticipation sera celle de demain, de 12h à 20h.

Pour connaître son bureau de scrutin: www.elections.ca ou 1-800-463-6868.