Québec et Terre-Neuve-et-Labrador doivent cesser leurs vieilles disputes et s'asseoir ensemble pour développer l'énergie hydroélectrique canadienne, plaide Michael Ignatieff.

Visitant successivement les capitales des deux provinces, hier, le chef du Parti libéral a réitéré son appui à une aide financière, par l'entremise d'une garantie de prêts, au projet de développement hydroélectrique du Bas-Churchill à Terre-Neuve. Or, Québec rejette catégoriquement ce coup de main fédéral, jugeant qu'il créerait une concurrence déloyale à Hydro-Québec.

Le litige entre les deux provinces dure depuis 40 ans, quand Hydro-Québec a signé un contrat pour acheter, à un prix dérisoire, l'énergie produite à Churchill Falls.

Depuis, la société d'État a refusé de consentir à ce que Terre-Neuve se serve des lignes à haute tension québécoises, une décision qui a mené les deux parties devant les tribunaux à de nombreuses reprises.

Pour Michael Ignatieff, il serait maintenant temps de trouver un terrain d'entente, dans l'intérêt national.

«Nous jouissons d'une des plus importantes réserves d'énergie verte sur terre. Si on ne s'assoit pas bientôt pour en venir à une entente, on aura une production sous-optimale alors qu'on pourrait être une superpuissance», a jugé le chef libéral, de passage à Halifax, hier matin.

Selon lui, avec les deux importantes sources d'énergie, au Québec et à Terre-Neuve-et-Labrador, on pourrait répondre aux besoins en électricité de l'important marché du nord-est des États-Unis, ainsi que de celui de l'Ontario.

«Il y a de nouveaux faits à considérer. Il y a 40 ans, Terre-Neuve-et-Labrador n'avait pas les mêmes leviers, a dit M. Ignatieff. Le projet va aller de l'avant. Les enjeux ont changé. Je suis conscient du niveau d'amertume ressenti par Terre-Neuve à propos de la première entente, mais les faits sur le terrain sont différents maintenant.»

Superprojet

C'est en novembre 2010 que Terre-Neuve a annoncé son superprojet de développement hydroélectrique, ne se cachant pas de vouloir concurrencer le Québec.

Conscient que le fédéral a une juridiction limitée en la matière, le chef du Parti libéral croit toutefois qu'Ottawa pourrait servir de médiateur dans le conflit.

«Qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour aider ces deux provinces à se parler entre elles, arriver à un accord avec l'aide possiblement d'un financement fédéral?» a-t-il dit.

Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a critiqué cette décision du chef libéral d'appuyer la garantie de prêt promise par les conservateurs au projet du Bas-Churchill à Terre-Neuve. M. Duceppe estime que ses trois rivaux se liguent contre le Québec en acceptant cette «concurrence déloyale» à Hydro-Québec. «C'est ça, la véritable coalition: c'est la coalition Canada», a déclaré le chef bloquiste.

Le premier ministre du Québec, Jean Charest, avait lui-même dénoncé la promesse conservatrice la semaine dernière, sortant d'une réserve qu'il s'était promis de garder pendant cette campagne électorale.

Michael Ignatieff a aussi indiqué qu'il entendait travailler avec le Québec pour faire reconnaître aux États-Unis l'hydroélectricité comme une énergie verte, sans quoi la Belle Province pourrait perdre d'importants revenus d'exportations dans les prochaines années.