Alors que Stephen Harper brandit l'épouvantail d'une coalition libérale appuyée par des «séparatistes», Jack Layton présente le NPD comme le seul parti pancanadien qui épouse les valeurs québécoises. Pour preuve, il veut mettre en place des «conditions gagnantes» pour que le Québec trouve sa place dans la fédération canadienne.

L'expression vient de l'ancien chef du Parti québécois Lucien Bouchard, à l'époque où l'on cherchait à déterminer le moment propice à un référendum sur la souveraineté. Dans sa première journée de campagne en sol québécois, hier, le chef néo-démocrate se l'est appropriée, cette fois pour vendre le Canada aux Québécois.

«Notre principe, c'est de créer les conditions gagnantes pour le Canada au Québec, a résumé le chef du NPD, hier, lors d'une entrevue à La Presse. De travailler d'une façon qui va encourager les Québécois à appuyer notre système actuel parce qu'ils voient dans les initiatives une connaissance de leurs espoirs et de leurs valeurs.»

N'en déplaise à Gilles Duceppe, un vote pour le Bloc québécois ne permet pas de freiner Stephen Harper, martèle M. Layton. À preuve, dit-il, le premier ministre est resté bien en selle lorsque le Bloc a fait élire une cinquantaine de députés, lors des deux derniers scrutins.

«Si on veut remplacer Stephen Harper, on ne peut pas continuer de voter pour un parti qui le laisse en poste, dit-il. Parce que, avec le résultat des dernières élections, peu importe le nombre de personnes qui ont voté pour le Bloc, M. Harper reste le premier ministre.»

Jack Layton refuse l'étiquette de «centralisateur» que ses adversaires lui ont déjà mise. Au contraire, plaide-t-il, son parti a régulièrement épousé les positions du Québec aux Communes. Le NPD s'est notamment opposé à la création d'une commission des valeurs mobilières centralisée, un projet que le gouvernement Charest a vertement critiqué. Il a également combattu une loi qui aurait réduit le poids du Québec à la Chambre des communes en augmentant le nombre de sièges en Ontario et dans l'Ouest. Et il a présenté des projets de loi sur le logement social, sur l'éducation postsecondaire, sur les changements climatiques, bref sur un éventail de dossiers qui préoccupent les Québécois.

Quelques espoirs

«Le NPD, dans toute son histoire, n'a pas eu un grand succès au Québec», concède toutefois le chef, qui a lui-même grandi à Hudson, à l'ouest de Montréal. Thomas Mulcair est son seul député dans la province, et il affronte l'ancien ministre Martin Cauchon dans Outremont.

Mais M. Layton a bon espoir de voir sa chance tourner au cours de la présente campagne. Il a confirmé hier qu'un militant bien connu de la nation crie, Roméo Saganash, portera les couleurs de son parti dans la circonscription Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou. Cette figure de proue du combat contre le projet hydroélectrique de Grande-Baleine tentera de ravir le siège du bloquiste Yvon Lévesque.

Le NPD espère aussi que Françoise Boivin, défaite par 1500 voix en 2008 dans Gatineau, pourra prendre sa revanche sur Richard Nadeau, du Bloc. Enfin, le parti fonde de grands espoirs sur la candidature de Nycole Turmel, ancienne présidente de l'Alliance de la fonction publique du Canada, dans Hull-Aylmer.

Mais c'est un autre candidat qui pourrait causer la surprise, si l'on en croit Thomas Mulcair, qui prévoit que l'ancien syndicaliste Claude Patry vaincra le ministre des Anciens Combattants, Jean-Pierre Blackburn.

«Vous pouvez prendre note, a-t-il déclaré, que je vous aurai prédit que le NPD allait gagner Jonquière-Alma.»