Il y a huit ans, l'historien et sociologue Gérard Bouchard a coprésidé une commission sur les accommodements raisonnables qui s'est conclue par un rapport de plus de 300 pages. Très conscient et désolé du fait que les gouvernements n'en ont guère pris acte depuis, il a tout de même été surpris de lire dans La Presse+ d'hier que deux écoles secondaires de la Commission scolaire de Montréal étaient en congé pédagogique lundi à l'occasion de la fête musulmane du Mouton - une fête dont la date précise est déterminée par des imams à la toute dernière minute.

CE QUI L'A ÉTONNÉ

« Je suis surpris qu'après tant d'années de débats, le monde scolaire ne soit pas mieux équipé pour traiter ce genre de problèmes. L'absence d'une politique générale laisse les directions d'école à elles-mêmes. Soumises à toutes sortes de pressions, il n'est pas certain qu'elles prennent les bonnes décisions. »

LES QUESTIONS QUE CELA POSE

« Comment est-ce que cela se passe dans les autres écoles ? Dans les autres commissions scolaires ? Des congés sont-ils donnés pour d'autres fêtes religieuses, pour des fêtes juives, par exemple ? Est-il équitable que des élèves musulmans de ces deux écoles aient droit à une journée pédagogique pour cette fête, mais pas les petits musulmans fréquentant d'autres écoles ? Des chrétiens très fervents pourraient-ils, eux aussi, réclamer par exemple d'avoir congé lors de la fête des Morts, en novembre ? Et une journée pédagogique, à quoi est-ce que c'est censé servir ? Est-ce un instrument qu'on peut utiliser à toutes les sauces ? On dit que ce sont notamment des enseignants qui ont réclamé un congé, mais quelle est la proportion d'enseignants qui l'ont demandé ? »

CE QUI DEVRAIT ÊTRE PRIVILÉGIÉ

« Il serait incorrect que des employés bénéficient de congés pour des fêtes religieuses dont d'autres employés non religieux seraient privés. Il y a là un problème d'équité. Si j'étais un enseignant non religieux et que je voyais un collègue bénéficier d'un privilège auquel je n'ai pas droit, je n'aimerais pas ça. Il y a nécessité de politique commune [à toutes les commissions scolaires], et ça presse. Il faut que cesse toute cette improvisation. Il y a un manquement important. »

CE À QUOI IL FAUT FAIRE ATTENTION

« Je ne dis pas qu'il faut mettre fin à toutes les permissions. [...] C'est une affaire compliquée à la lumière de ce que l'on sait et à la lumière de ce que l'on ne sait pas. Il y a les principes, il y a la réalité. [Là où des congés pédagogiques ne sont pas accordés et où des remplaçants sont appelés en renfort], il peut y avoir des coûts. [...] Mais il faut qu'il y ait équité. »

CE QU'IL FAUT FAIRE DE PÂQUES ET DE NOËL

« Dans nos sociétés, ces fêtes ne sont plus considérées comme des fêtes religieuses. Il y a sécularisation et commercialisation de ces fêtes. Quand on a voulu enlever le sapin devant l'hôtel de ville de Montréal, des juifs sont venus dire qu'il fallait le garder... »