Un investisseur anonyme retient un don de 2 millions qu'il voulait faire à l'Université McGill tant que l'établissement montréalais ne se sera pas retiré du secteur des hydrocarbures, devant l'urgence de la crise climatique.

Cette annonce a galvanisé une troupe d'une centaine d'étudiants, militants de l'organisme Divest McGill, réunis pour assister à une « remise de diplômes » à l'envers.

Un à un, une quinzaine de diplômés de McGill sont venus déposer leur diplôme sur une chaise vide, devant le campement improvisé des militants qui manifestent depuis une semaine sur le campus montréalais pour presser le Fonds de dotation McGill de liquider ses actifs dans le secteur des hydrocarbures.

Parmi ces diplômés, Naghmeh Sabet, bachelière en biochimie de 1988 et conseillère financière chez ScotiaMcLeod à Montréal.

« J'ai un client, diplômé de McGill, qui voulait créer un fonds de 2 millions en faveur de l'université, a-t-elle expliqué à La Presse. Le dossier était assez avancé, quand nous avons reçu un courriel le 27 février où la principale Suzanne Fortier nous annonçait qu'elle refusait de désinvestir dans le secteur des hydrocarbures. Pour nous, il n'y aura pas de don tant que l'université n'aura pas changé d'idée. Et je vais en parler à mes autres clients. »

Parmi les autres diplômés déçus, Camil Bouchard, qui a reçu son doctorat de psychologie en 1974. « C'est un établissement que j'ai beaucoup aimé, mais je ne me sens plus capable de représenter McGill », dit-il. Il a annoncé qu'il allait aussi cesser d'ajouter « Ph. D. McGill » à sa signature professionnelle.

Le directeur pour le Québec de la Fondation David Suzuki, Karel Mayrand, a brandi son diplôme de science politique de 1994, en citant Elie Wiesel, qui était l'invité d'honneur de sa cérémonie de remise de diplômes. « Il nous a dit : "Ce diplôme vient avec la responsabilité de ne jamais rester indifférent." Et c'est ce que l'Université McGill fait en gardant ses investissements dans les hydrocarbures. »

De jeunes diplômés ont livré des plaidoyers sentis en se départant de leur diplôme, rappelant ce qu'il leur avait coûté d'efforts, eux ou leur famille. « Même si le geste est symbolique, il est lourd de sens », a dit l'un d'eux.

Cette « anticérémonie » n'a pas ébranlé la direction de McGill. L'Université s'en tient aux recommandations d'un comité saisi il y a un an de la demande de Divest McGill.

« Le comité a fait une évaluation en profondeur de la situation, et la décision est basée sur l'état actuel des lieux, affirme en entrevue Olivier Marcil, vice-principal aux relations externes. Le comité a préféré des actions immédiates, concrètes et qui vont plus loin que le symbole. »

McGill va adopter un plan pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre et va créer à l'endroit de ses donateurs un fonds d'investissement dans les technologies propres. Elle va aussi augmenter son financement de la recherche dans ce secteur.

« La planète n'est pas prête à un désengagement massif du secteur des hydrocarbures », affirme M. Marcil.