Une coalition de syndicats, de directeurs d'école et de comités de parents disent «sonner l'alarme» quant au manque d'investissement en éducation, déplorant du même souffle ce «choix politique» du gouvernement Couillard.

En conférence de presse dimanche après-midi à Montréal, les représentants de plusieurs fédérations ont demandé un réinvestissement d'urgence et la fin des compressions dans le domaine de l'éducation. Ils réclament «au minimum» le milliard de dollars qu'ils disent avoir perdu depuis cinq ans.

Selon eux, les professeurs et les directeurs d'école ont épuisé leur créativité et les élèves commencent à ressentir concrètement les effets du manque de ressources. «Ils ont réussi à faire des miracles (avec les ressources), mais là, on est au bout du miracle», a lancé Josée Scalabrini, présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement.

Ainsi, les écoles manquent de personnel, comme des infirmières - une «denrée rare» pourtant importante, disent-ils - et des orthopédagogues et les directions doivent abolir des programmes pédagogiques.

«Il est odieux qu'une direction d'école ait à faire des choix à savoir à quel élève elle va donner des services. Autrement dit, lequel des élèves en a le moins besoin», a dénoncé Lorraine Normand-Charbonneau, présidente de la Fédération québécoise des directions d'établissements d'enseignement.

Les élèves ne reçoivent même plus leur berlingot de lait, alors que plusieurs d'entre eux n'ont rien dans l'estomac en arrivant le matin, a ajouté Mme Scalabrini. «Les écoles commencent même à couper dans le papier de toilette», a renchéri Corinne Payne, de la Fédération des comités de parents du Québec.

Mme Payne a d'ailleurs remarqué que les parents avaient de plus en plus à débourser de l'argent de leur propre poche pour avoir finalement moins de services. «Les parents paient une double facture (...) On paie plus pour le transport scolaire, on paie plus pour le service de garde, on paie plus pour ouvrir des dossiers, on paie plus pour les frais de surveillance», a-t-elle déploré.

Louise Chabot, présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) croit qu'il s'agit d'abord d'un «choix politique» du gouvernement du Québec puisqu'il est en «surplus technique», a-t-elle souligné. Il existe des ressources au gouvernement et le premier ministre Philippe Couillard serait en mesure de réinvestir, a-t-elle martelé.

«Assez, c'est assez! C'est impensable de croire que les compressions n'affecteront pas les services», a-t-elle lâché.

La coalition compte envoyer une lettre au ministre de l'Éducation du Québec, François Blais, pour qu'il «prenne les moyens pour assurer un investissement important et adéquat».

L'attachée de presse du ministre Blais, Julie White, a rappelé que dans le contexte actuel, le gouvernement demandait un effort budgétaire qui représente «seulement 1 pour cent du budget alloué aux commissions scolaire».

En entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne, elle a souligné qu'un rapport rédigé par l'économiste Guy Lacroix sur les finances des commissions scolaires démontrait qu'elles pouvaient atteindre «les mêmes résultats à moindre coût» et qu'il était possible de faire des économies de l'ordre d'un milliard de dollars.

«On croit beaucoup à notre réseau d'école publique et c'est d'ailleurs pourquoi on veut l'améliorer», a-t-elle expliqué, mentionnant entre autres un investissement totalisant 400 millions $ pour agrandir ou construire de nouvelles écoles.

Des chaînes humaines devant les écoles mardi

Pour une troisième fois en quelques mois, des chaînes humaines se formeront autour des écoles publiques de la province mardi, le 1er septembre, pour dénoncer les coupes budgétaires dans le milieu de l'éducation.

Le mouvement «Je protège mon école publique» prend de l'ampleur alors que plus de 150 écoles réparties dans 15 régions administratives du Québec participeront à l'événement.

Parents et enfants sont invités à se rendre devant leur école de quartier une demi-heure avant le début des classes, mardi, pour se tenir la main et ainsi former une chaîne humaine.

Un symbole pour démontrer que les parents sont préoccupés par les récentes compressions de 350 millions $ imposées au réseau de l'éducation par le gouvernement Couillard, explique Pascale Grignon, qui agit à titre de porte-parole du regroupement.

Une première chaîne humaine avait été formée le 1er mai dernier à l'initiative de parents d'élèves qui fréquentaient l'école Saint-Jean-de-Brébeuf dans le quartier Rosemont à Montréal.

Quelque 26 écoles avaient participé à cette première présentation. Un mois plus tard, plus de 8000 parents avaient récidivé en formant des chaînes humaines devant une centaine d'écoles réparties dans huit régions du Québec.

«Le souhait, c'était de démontrer l'attachement que les gens ont envers leurs écoles, poursuit Mme Grignon. La réalité, c'est que les compressions jouent sur les milieux de vie de milliers d'enfants du Québec. Ces milieux de vie-là, ce sont les écoles.»

Elle cite notamment à titre d'exemples les postes de conseillers pédagogiques, d'orthopédagogues, de psychoéducateurs ou de directeurs adjoints qui ont été coupés dans les écoles affectant directement la réussite scolaire, estime-t-elle.

«En ce moment, il n'y a aucune écoute de la part du gouvernement, s'indigne Mme Grignon. Le ministre de l'Éducation François Blais dit encore qu'il n'y aucune mobilisation... il va y avoir 10 000 parents devant les écoles mardi!»

Mme Grignon invite d'ailleurs tous les parents du Québec à participer au mouvement. Nul besoin de déployer une grande organisation, indique-t-elle, il suffit de se rendre devant une école publique et de tendre la main aux autres parents.