Le redécoupage de la carte des commissions scolaires dans l'île de Montréal sera mis sur la glace le temps qu'un comité se penche sur la question, indique le cabinet du maire de Montréal.

Denis Coderre a rencontré le ministre de l'Éducation, Yves Bolduc, hier, pour discuter du projet de révision des territoires que desservent les trois commissions scolaires de l'île. Devant les oppositions soulevées à la carte envisagée, les deux élus «ont convenu de créer un comité pour discuter de la question. D'ici là, il n'y aura pas de décision quant au redécoupage», indique Louis-Pascal Cyr, porte-parole du maire.

Il n'a pas été possible de connaître la composition complète de ce comité. Denis Coderre a toutefois demandé à l'élue de l'opposition Lorraine Pagé, qui a longtemps dirigé la Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ), d'y siéger. «Le redécoupage, tel qu'il est, va priver les élèves de l'actuelle Commission scolaire de Montréal de l'accès à un ensemble d'écoles spécialisées. Il y a vraiment une préoccupation pour le service aux élèves», a-t-elle indiqué à La Presse.

Au cabinet du ministre, on s'est limité à confirmer la tenue de la rencontre lors de laquelle il a été question du redécoupage. «On annoncera ce qu'on annoncera en temps et lieu», ce qui devrait être fait d'ici quelques jours, a simplement indiqué l'attachée de presse du ministre, Yasmine Abdelfadel.

Cette dernière précise que le sujet principal de la rencontre était non pas le redécoupage des commissions scolaires, mais plutôt la «persévérance et réussite scolaire, comment M. Coderre et M. Bolduc peuvent travailler ensemble pour développer une stratégie pour Montréal. On comprend que Montréal a des réalités particulières avec l'immigration, il y a des poches de pauvreté et il y a des infrastructures qui peuvent être déficientes».

Gestion des écoles

La gestion immobilière des commissions scolaires a d'ailleurs été au coeur de l'actualité hier. Projet Montréal s'est prononcé en faveur hier de l'idée de l'administration Coderre, qui souhaite récupérer dans les négociations sur son statut de métropole la gestion des immeubles des commissions scolaires. L'opposition officielle estime qu'un tel transfert pourrait générer des économies en optimisant l'utilisation de ces bâtiments, notamment les gymnases et les bibliothèques.

«Les enfants qui sont à l'école de jour, ce sont les mêmes enfants qu'on veut occuper le soir avec nos sports et loisirs», a souligné l'élu Sylvain Ouellet. Projet Montréal n'a toutefois pas chiffré les économies potentielles.

En fait, un tel transfert de responsabilité serait surtout l'occasion de revoir le financement consacré à l'entretien des bâtiments scolaires, dit le chef de l'opposition, Luc Ferrandez. Quatre écoles de la métropole sont présentement fermées en raison de leur état problématique.

Le chef de l'opposition admet qu'avec ses rues trouées de nids-de-poule et ses nombreux immeubles vétustes, Montréal est loin d'être un exemple en matière de gestion des biens publics. «Vous avez raison de dire qu'il y a plusieurs infrastructures montréalaises qui ne sont pas à notre honneur. Si on fait cette fusion, il faut qu'on détermine une enveloppe d'investissements suffisante pour s'occuper de ces écoles», a-t-il indiqué.

Cette sortie de Projet Montréal est survenue alors que le maire Coderre rencontrait le ministre de l'Éducation pour parler de la configuration des commissions scolaires dans l'île. Il n'a pas été possible de savoir si les discussions ont débouché sur des changements au projet de révision de la carte. Sur les réseaux sociaux, le maire s'est simplement dit heureux de l'appui de l'opposition à son projet de récupérer la gestion des immeubles scolaires.

Accueil froid

La proposition a toutefois été froidement accueillie par la principale association représentant les villes, l'Union des municipalités du Québec (UMQ). «Le monde municipal n'est pas particulièrement enthousiaste par rapport à de telles demandes. Les villes sont déjà responsables de 58% des infrastructures publiques, alors leur cour est déjà pleine», a indiqué un porte-parole, Patrick Lemieux.

La Fédération des commissions scolaires du Québec a vivement réagi, estimant que l'idée est une mauvaise solution. Disant ne pas croire aux économies d'échelle qu'un tel transfert pourrait générer, l'organisation avance que les frais de gestion des commissions scolaires sont de 5%, contre 14% pour les municipalités.

La présidente de la Commission scolaire de Montréal (CSDM), Catherine Harel Bourdon, s'est tout de même dite prête à étudier la question. «On est conscients qu'il y a peu d'argent, alors je ne verrais pas pourquoi on ne travaillerait pas ensemble», a-t-elle indiqué.

1 milliard sur 10 ans

La CSDM gère environ 280 bâtiments dans la métropole, pour l'entretien desquels elle recevait jusqu'à récemment moins de 7 millions de dollars par année. Ce budget a été gonflé à 50 millions, ce qui reste toutefois loin des investissements requis. Catherine Harel Bourdon évalue que la CSDM aurait besoin de 1 milliard sur 10 ans pour rattraper le retard pris dans l'entretien des bâtiments.