Plutôt que de songer à évaluer les enseignants, le gouvernement Couillard devrait plutôt « se préoccuper des vraies affaires, c'est-à-dire accorder les moyens à l'école de mieux soutenir la réussite des élèves », plaide la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE), qui représente 60 000 profs au Québec.

La réaction syndicale n'a pas tardé après la parution, mercredi, d'une entrevue dans Le Soleil avec le ministre Yves Bolduc, qui affirme réfléchir à un système d'évaluation des enseignants, un peu à l'image de ce que fait le Collège des médecins.

Par la bouche de sa présidente Josée Scalabrini, la FSE a attrapé la balle au bond. « Il faut encore rappeler au ministre Bolduc que le réseau scolaire ne se gère pas comme celui de la santé et que les objectifs y diffèrent fondamentalement. Revaloriser la profession enseignante, mais à coût nul, comme il le dit, ne passe assurément pas par une augmentation de la pression sur le dos des enseignantes et enseignants, surtout dans un contexte où on coupe effrontément dans les moyens qu'on met à leur disposition pour les aider à faire réussir les élèves. »

Lorraine Normand Charbonneau, présidente de la Fédération québécoise des directions d'établissement, se demande également si cela doit être une priorité dans le contexte actuel et si une évaluation mur à mur ne ferait pas qu'ajouter à la bureaucratie.

Cela dit, elle regrette que les directions d'école ne prennent pas partout le temps de faire une évaluation maison. « Les enseignants auraient tort de voir cela comme une menace. Il est bon de prendre un temps d'arrêt et de voir ce qui fonctionne bien ou moins bien et de discuter, au besoin, de formation continue. »

Mais à la base, dit-elle, la qualité des enseignants dépend beaucoup des exigences minimales d'admission et de la formation offerte dans les facultés de sciences de l'éducation. « Les programmes pourraient être plus contingentés pour que seuls les meilleurs soient retenus. À l'heure actuelle, pour bon nombre de candidats, l'enseignement n'est qu'un deuxième ou un troisième choix de champ d'études. »

L'avocat Jean-Pierre Ménard, qui se spécialise dans les dossiers d'erreurs médicales, se montre pour sa part surpris que le ministre Bolduc évoque la possibilité de reproduire en éducation le système d'évaluation du Collège des médecins.

« L'évaluation qui s'y fait n'est pas du tout systématique. Très peu d'évaluations de médecins sont faites au hasard. Je serais étonné qu'Yves Bolduc, comme médecin, ait été évalué une seule fois dans sa vie. »

Au Collège des médecins, on indique que 2 % des évaluations sont faites tout à fait au hasard. On juge préférable de cibler des médecins qui présentent de plus hauts facteurs de risque, notamment ceux qui pratiquent en solo, qui ont plus de 75 ans ou qui ont fait l'objet de plaintes.

Entre 2007 et 2013, 1179 inspections professionnelles ont été faites par le Collège des médecins.

Le Collège a par ailleurs radié 15 médecins de façon temporaire (à la suite de problèmes réels) et 2 de façon provisoire (de façon préventive, dans l'attente de l'évaluation finale).