Les garderies privées subventionnées renoncent à tenir une deuxième journée de grève, mercredi. Dans une lettre obtenue par La Presse, Québec les menace de révoquer leur permis si elles ferment encore leurs portes.

«C'est de l'intimidation», s'exclame le président de l'Association des garderies privées du Québec (AGPQ), Sylvain Lévesque. «Il y a du monde avec qui ça marche, ce genre de menaces, et ça devient difficile de mobiliser les gens. Ils ont peur.»

L'AGPQ tiendra malgré tout une manifestation devant l'Assemblée nationale mercredi pour protester contre les compressions de 15 millions de dollars.

La semaine dernière, le sous-ministre adjoint à la Famille, Jacques Robert, a écrit aux 214 garderies privées subventionnées (sur un total de 650) qui ont fait la grève le 22 mai, selon les vérifications des fonctionnaires. Il confirme que leur subvention sera réduite de 3750 $ en moyenne, comme la ministre Nicole Léger l'avait annoncé. Les garderies n'ont pas «respecté les dispositions de l'entente de subvention» en fermant le 22 mai, explique M. Robert. Il prévient que les amendes s'élèveront à 4375 $ puis à 5000 $ pour une deuxième et une troisième journée de grève.

Mais le sous-ministre laisse planer une nouvelle menace: les sanctions imposées par la ministre sont prises «sans préjudice à son droit d'entreprendre les procédures de suspension ou d'annulation de la subvention, ainsi que de suspension ou de révocation de votre permis».

«La ministre va trop loin, a lancé Sylvain Lévesque, lundi. Révoquer un permis, ça se fait pour des raisons majeures, contre des garderies délinquantes qui ne donnent pas des services de qualité. Elle veut nous intimider pour ne pas qu'on sorte.»

Questionné par La Presse, le cabinet de la ministre Nicole Léger a tenté de minimiser son avertissement. Il a répondu par courriel que c'est une «nécessité administrative de rappeler que la loi permet à la ministre de suspendre ou de révoquer un permis». Il ajoute qu'«il n'est pas question» de recourir à cette mesure qui, du reste, s'applique dans des cas «extrêmes et rares», une précision qu'on ne retrouve toutefois pas dans sa lettre aux garderies.

En renonçant à une deuxième journée de grève, les garderies veulent éviter de «payer en amendes ce que le gouvernement demande en compressions». Au total, les amendes pour la première journée de grève totalisent 802 500 $.

L'AGPQ contestera leur légalité. Elle a fait appel à l'avocat Julius Grey.

Les parents sollicités

Les garderies seront donc ouvertes mercredi, mais elles demandent aux parents de ne pas envoyer leurs enfants «volontairement». Elles veulent ainsi avoir un maximum de participants à leur manifestation tout en échappant aux amendes. «Les comités de parents appuient cette façon de faire», selon Sylvain Lévesque. L'AGPQ demande la nomination d'un médiateur pour régler le conflit.

De son côté, Nicole Léger reste ferme sur ses compressions. Elle fait valoir que les garderies privées subventionnées ont cumulé des bénéfices de 160 millions de dollars.

Aucune discussion n'a eu lieu entre les parties depuis le 21 mai. Ce jour-là, selon l'AGPQ, la sous-ministre Line Bérubé a proposé d'étaler les compressions sur trois ans, les garderies étaient prêtes à accepter cette offre, mais le gouvernement Marois a mis fin abruptement aux négociations. Nicole Léger n'a pas nié ces informations.