À Montréal, les écoles primaires débordent, alors qu'il manque d'élèves dans les écoles secondaires. La Commission scolaire de Montréal, fortement déficitaire, envisage donc une restructuration qui toucherait la moitié de ses écoles, a appris La Presse. Le plan prévoit notamment la création d'écoles intermédiaires, qui regrouperaient les élèves de fin de cycle du primaire et de début de cycle du secondaire.

La Commission scolaire de Montréal (CSDM), fortement déficitaire, envisage de chambarder son réseau en créant une nouvelle catégorie d'écoles, a appris La Presse. Ces écoles regrouperaient les élèves de fin du primaire avec ceux du début du secondaire.

Selon nos informations, la restructuration pourrait toucher la moitié des 149 écoles primaires et secondaires de la CSDM et des milliers d'élèves et d'enseignants. La nouvelle catégorie d'écoles s'inspire de concepts semblables ailleurs dans le monde, appelés «middle schools» (écoles intermédiaires).

La CSDM a commandé une étude à ce sujet, qui sera remise la semaine prochaine au directeur général Gilles Petitclerc. Le rapport du groupe de travail se penchera sur les principes, mais proposera également des réorganisations précises d'écoles, avec un échéancier.

80 écoles

Si la réorganisation va de l'avant, plusieurs écoles actuelles verraient leur vocation changée. Essentiellement, les écoles intermédiaires regrouperaient les élèves de 5e et 6e année du primaire avec ceux des deux premières années du secondaire.

En conséquence, plusieurs écoles seraient réorganisées pour accueillir seulement les élèves des quatre premières années du primaire. En fin de parcours, certaines écoles se concentreraient plutôt sur les trois dernières années du secondaire. À terme, il ne resterait plus beaucoup de polyvalentes regroupant les élèves de la première à la cinquième secondaire, telles qu'on les connaît.

Quelque 80 écoles seraient visées par la restructuration, selon nos renseignements. Le groupe de travail propose que les écoles intermédiaires soient implantées sur trois ou quatre ans à partir de l'année scolaire 2014-2015. Si le projet va de l'avant, les parents pourraient donc devoir faire de nouveaux choix d'inscriptions dès l'an prochain.

Budget et démographie

Diverses raisons militent en faveur d'un tel chambardement. D'abord, la démographie pose de sérieux problèmes à la CSDM. Plusieurs écoles primaires débordent en raison du boom de naissances des dernières années. À l'inverse, on estime qu'il y a 8000 places libres dans les écoles secondaires. Le changement permettrait d'éviter de construire de nouvelles écoles.

Deuxièmement, la CSDM cherche à résorber son énorme déficit. Pour l'année en cours, le déficit autorisé par le gouvernement est de 47,5 millions. Il était de 32 millions l'année dernière et de 22 millions l'année précédente.

Le rapport estime que la CSDM pourrait économiser une quinzaine de millions de dollars par année avec la restructuration, grâce à la fermeture de petites écoles et à l'optimisation des ressources. Le budget annuel de la CSDM est de 921 millions de dollars.

Autre avantage recherché: les écoles intermédiaires pourraient endiguer le flot de départ d'élèves du public vers le privé. Ces écoles favoriseraient en effet le sentiment d'appartenance des élèves et amélioreraient leur intégration éventuelle à l'école secondaire des plus vieux.

La restructuration pourrait également diminuer le taux de décrochage au secondaire, espère-t-on. D'une part, le mariage des élèves de 11 ans à 17 ans au secondaire n'est pas toujours heureux pour les plus jeunes. D'autre part, certaines écoles secondaires problématiques, qui ont un fort taux de décrochage, pourraient être ciblées.

À la CSDM, le taux de décrochage atteint des proportions dramatiques dans certaines écoles. Globalement, le taux de décrochage y est de 26,6% dans les écoles secondaires. Il atteint 31,1% chez les garçons. La moyenne québécoise est de 16,6% (20,1% chez les garçons), selon les statistiques du ministère de l'Éducation.

Enfin, la création d'écoles regroupant un plus grand nombre d'élèves de 3e à 5e secondaire permettrait d'offrir plus de choix de cours. Actuellement, certaines options ne sont pas offertes dans certaines écoles en raison d'un nombre insuffisant d'élèves. De plus, le regroupement d'élèves permettrait à des professeurs d'avoir des tâches moins morcelées.

Selon nos informations, ni les directions d'école ni les enseignants n'ont été mis au courant de ces analyses sur la réorganisation scolaire. À la CSDM, le porte-parole Alain Perron confirme qu'une étude est en cours, mais soutient qu'aucune décision n'a été prise et qu'il s'agit seulement d'une étape exploratoire.

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Seulement une étape exploratoire, soutient la CSDM

La Commission scolaire de Montréal (CSDM) confirme qu'un groupe de travail se penche sur un projet pouvant mener à la formation d'écoles intermédiaires, qui regrouperaient des élèves de la fin du primaire et du début du secondaire.

Toutefois, le porte-parole Alain Perron soutient qu'il s'agit seulement d'une option parmi d'autres. «Le rapport sera soumis dans quelques jours. C'est une exploration qu'on fait parmi plusieurs modèles, mais sans plus pour l'instant. Il y a loin de la coupe aux lèvres», affirme-t-il.

La CSDM a formé sept «équipes actions» pour l'aider à faire face à ses nouveaux défis, dont l'une (baptisée services pédagogiques) travaille sur cette réorganisation des écoles. Les six autres «équipes actions» se penchent sur l'autonomie et l'imputabilité des écoles, les centres de services partagés, les profils de compétence, la structure organisationnelle et le cadre de gouvernance, l'offre de services et, enfin, sur l'expérience employé.

Tel que suggéré par le ministère de l'Éducation, la CSDM a embauché une firme comptable pour l'accompagner dans ses travaux. La firme en question, PriceWaterhouse Coopers, aide notamment la CSDM à trouver des solutions pour résorber son énorme déficit.

La CSDM, rappelons-le, a essuyé des déficits de 32 millions en 2011-2012 et de 22 millions l'année précédente. Pour l'année en cours, qui se termine le 30 juin, le gouvernement a accepté que le déficit atteigne 47,5 millions, mais la CSDM doit stopper l'hémorragie.

Certains rapports des sept «équipes actions» ont déjà été remis, les autres le seront d'ici la fin de juin. Selon M. Perron, le ministère de l'Éducation est au courant que la CSDM a commandé des études sur la réorganisation des écoles, mais elle n'est pas au fait des détails.

Au cabinet de la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, le porte-parole Mathieu Leblanc soutient de son côté que Marie Malavoy n'a jamais été mise au courant des analyses de la CSDM sur les écoles intermédiaires (middle schools). «Ça n'est jamais monté au cabinet. Vous nous l'apprenez», dit M. Leblanc.