Les petits de la classe d'accueil de Christine Dorion, à l'école de la Mosaïque, ont le nez collé à la fenêtre pour voir les premiers flocons de neige tomber sur Montréal.

L'excitation est à son comble. La plupart d'entre eux n'ont jamais vu la blancheur de l'hiver. Plus de 92% des élèves de cette école primaire du quartier Côte-Saint-Luc sont allophones.

Sur le territoire de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB), près des deux tiers des élèves n'ont pas le français comme langue maternelle. Un portrait qui s'est accentué au fil des ans.

Intégrer les élèves à la société québécoise, en français, constitue un grand défi, explique Diane Lamarche-Venne, présidente de la CSMB.

«Sur le terrain, cet enjeu majeur amène son lot de questions. Comment accorder une juste place à la culture québécoise? Comment faire d'une classe un tout pour sortir du "eux autres" et du "nous autres"? Comment s'assurer d'être équitables envers tous?», demande Mme Lamarche-Venne.

Chantier de réflexion

Pour répondre à ces questions, la CSMB met sur pied un vaste chantier de réflexion et d'actions sur la francisation. Au terme de deux années de travail, elle souhaite dégager des pistes de solution et les intégrer à son plan stratégique.

L'Institut du Nouveau Monde et Vision Diversité participent au projet. Ils organiseront entre autres des groupes d'échange avec les élèves, les parents, les enseignants et le personnel des écoles pour faire la liste des bonnes pratiques qui fonctionnent et les reproduire dans d'autres écoles.

Un Centre d'intervention pédagogique en contexte de diversité, créé par la CSMB, se penchera pour sa part sur la recherche appliquée.

«Le centre va s'appliquer à voir les besoins qui ne sont pas couverts», explique Rachida Azdouz, directrice scientifique.

Beaucoup de travail reste à faire en ce qui concerne la gestion des conflits de valeurs qui peuvent survenir entre les élèves ou entre les parents et l'école, souligne Mme Azdouz.

L'école de la Mosaïque a de l'expérience en la matière. La majorité de ses élèves vient de l'Égypte, de la Moldavie ou d'Israël. Elle compte plusieurs classes d'accueil en francisation, et certains de ses enseignants sont eux-mêmes originaires d'un autre pays.

Ils ont connu les joies, mais aussi les difficultés de s'intégrer à une nouvelle société. Ils travaillent autant avec les élèves qu'avec leurs parents pour les aider à s'adapter et à s'intégrer.

«Ça demande beaucoup de souplesse et d'ouverture», explique Nicoleta Leonte, enseignante dans une classe d'accueil de deuxième cycle, elle-même originaire de la Roumanie.

Le fait qu'elle vienne d'ailleurs, qu'elle parle le russe et le roumain, l'aide à établir un premier lien de confiance avec les élèves et leurs parents, croit-elle.

Les enfants sont de véritables éponges. Ils réussissent généralement à s'intégrer et à apprendre le français rapidement, souligne Linda Ghermine, Algérienne d'origine et enseignante en deuxième année.

La situation est parfois plus difficile pour leurs parents. Ils quittent un statut en immigrant au Québec. Ils doivent retourner aux études, se trouver un emploi. Ils vivent souvent de l'insécurité financière. Plusieurs familles ont vécu des drames. L'un des parents est parfois resté derrière.

Il faut constamment composer avec des subtilités, indique Fatiha Senniane, enseignante en classe d'accueil et originaire de l'Algérie. Elle se rappelle une petite fille qui s'est mise à pleurer pendant un exercice d'incendie, alors que ses camarades de classe se dirigeaient en vitesse vers la cour de récréation. «Elle pensait qu'il y avait la guerre comme chez elle, en Irak.»