Après avoir sillonné les rues du Plateau-Mont-Royal, une poignée d'étudiants sont allés perturber la quiétude de l'Université McGill pour y dénoncer ce qu'ils qualifient de répression des administrations universitaires anglophones contre les militants.

Ils étaient environ 150 et s'étaient donné rendez-vous au parc La Fontaine en matinée, avant de prendre la rue pour une destination encore inconnue.

C'est finalement devant le pavillon administratif de l'Université McGill qu'ils se sont arrêtés. La plupart se sont assis par terre sous le regard des agents de sécurité.

Aussitôt, une partie des participants s'est mise à critiquer le déroulement de la manifestation, qui avait initialement été annoncée comme une «action».

«Il faudrait à l'avenir nous dire quand il s'agit d'une simple manifestation plutôt que d'une action», a lancé un jeune homme, visiblement désireux de participer à une action plus musclée.

«On se croirait dans une manifestation de la FECQ», a dit un autre (la Fédération étudiante collégiale du Québec est connue pour ses méthodes plus modérées).

Le groupe s'est remis en marche pour traverser quelques pavillons de l'université, à commencer par celui des arts, où une brève bousculade a eu lieu entre les étudiants et les agents de sécurité, qui ont tenté de leur refuser l'accès.

Mais les agents les ont finalement laissés passer.

«Wake up McGill», ont crié à tue-tête les manifestants à leurs collègues anglophones, perçus comme moins engagés dans le mouvement.

Mais cette bruyante manifestation a été accueillie dans la plus grande indifférence.

«Ils ont le droit de faire valoir leur point de vue. Mais pourquoi venir nous déranger ici, en pleine période d'examens ? Il y a un examen de psychologe sociale dans la salle d'à côté», a dit une étudiante.

«Je vais frapper quelqu'un», a lancé une autre, en anglais, en tentant d'entrer dans une bibliothèque occupée par les protestataires.

Un des leaders de la manifestation a expliqué que cette action visait à appuyer les militants de McGill, qui subiraient, à l'instar de ceux de Concordia, de la répression de la part de l'administration.

Cette affirmation est relayée régulièrement dans les manifestations. Récemment, des professeurs de McGill ont même confié que la direction leur demand de punir les élèves qui boycottent les cours.

Sur son site web, l'université anglophone indique plutôt que les élèves ont droit à la liberté d'expression et sont libres de se joindre au mouvement de protestation.

«Toutefois, si vous n'allez pas en classe, ratez des tests et examens ou remettez des travaux en retard, vous pourriez subir les conséquences académiques associées aux gestes que vous posez. Vos professeurs n'ont pas à acquiescer à vos demandes de report de date de remise de travaux, ou de modification de dates de tests ou examens», lit-on sur le site.

À Concordia aussi, la tension est vive entre les militants et l'Administration.

Depuis le début de la grève étudiante, l'Université a embauché des agents de sécurité pour s'assurer que l'accès aux cours ne soit pas entravé.

«Chez nous, la majorité des cours se tiennent comme d'habitude. Certains départements sont plus participants au boycottage, comme la géographie et les arts, où des étudiants essaient de bloquer l'accès aux cours. On a eu une tolérance d'une semaine ou deux. Mais on ne peut pas aller plus loin. Des étudiants nous disent qu'ils sont frustrés, que c'est leur dernier trimestre et que ça ne peut plus durer. Donc, si quelqu'un appelle les agents de sécurité pour dire qu'il n'est pas capable d'entrer dans un cours, l'agent tente de discuter avec les manifestants pour obtenir qu'ils libèrent l'accès. Dans certains cas, ça marche. Dans d'autres, les manifestants ne veulent pas se déplacer. Ils doivent alors s'identifier. S'ils ne veulent pas, les agents les prennent en photo et une plainte sera acheminée au bureau des droits et responsabilités pour tenter de l'identifier», explique Christine Mota, porte-parole de Concordia.

Elle précise que cet organisme est ensuite chargé de juger et de sanctionner, le cas échéant, les manifestants fautifs. Quand les plaintes émanent d'étudiants, le comité chargé de juger est aussi constitué d'étudiants.

Une manifestante s'est plainte d'avoir été frappée par un des agents de sécurité, sur quoi l'Université fait enquête.

Mme Mota insiste pour dire que l'Université reconnaît aux étudiants le droit de manifester, mais elle ajoute que la plupart des étudiants de Concordia sont contre la grève et qu'ils n'ont pas à être pénalisés par ce mouvement.