Les syndicats de l'enseignement menacent de partir en guerre contre le gouvernement si jamais il s'avise de sabrer dans le budget des commissions scolaires.

Pour le président de la Centrale des syndicats du Québec, Réjean Parent, les politiciens sont «tous devenus fous» à vouloir «déconstruire» un système d'éducation certes perfectible mais qui a fait ses preuves.

«Il y a des débordements dans les classes, de la pression sur le personnel, on a de la misère à le trouver le gras, on est plutôt en carence de moyens et (ils mettent) encore de la pression», a-t-il dénoncé en point de presse.

Réunies à Montréal, les instances de la CSQ n'ont exclu aucun moyen vendredi, y compris le recours à la grève, pour empêcher le gouvernement de couper de moitié les vivres aux 69 commissions scolaires déployées sur le territoire québécois.

«Les 300 délégués qui étaient là ce matin sont montés au plafond! Pour la centrale, c'est une déclaration de guerre. Je peux vous dire qu'il y a des gens dans la salle qui n'excluaient aucun moyen, aucun moyen, parce que là, ça suffit. Va falloir revenir au bon sens», a lancé M. Parent.

«On ne laissera pas les destructeurs poursuivre leur oeuvre sans qu'ils nous trouvent sur leur chemin», a-t-il poursuivi.

La ministre de l'Éducation, Line Beauchamp, a annoncé jeudi son intention d'amputer de près de 300 millions $ le budget administratif des commissions scolaires sur une période de trois ans. L'objectif visé par la ministre est d'accorder plus de pouvoirs et d'autonomie aux directions d'école.

Mais la CSQ prévient qu'elle ne laissera pas le gouvernement sabrer 300 millions $ dans le système d'éducation alors que le réseau, selon elle, manque cruellement de ressources.

De fait, l'argent économisé grâce à la réforme proposée par Mme Beauchamp ne serait pas redistribué en totalité aux écoles. Des fonds seraient cependant transférés aux établissements en échange d'une reddition de compte et en vertu de critères de réussite.

De l'avis de la CSQ, ce mécanisme ne fera qu'encourager «la tricherie» et le «gonflement des résultats» dans les établissements à la recherche d'un meilleur financement.

«Ça nous éloigne de la mission éducative, ça n'améliorera pas la situation des élèves. Au contraire, les élèves qui ont le plus de difficultés seront laissés pour compte», a prédit M. Parent.

Le chef syndical a aussi exprimé son ras-le-bos d'entendre les leaders d'opinion, qu'ils soient à l'Assemblée nationale ou dans les coulisses comme François Legault de la Coalition pour l'avenir du Québec (CAQ), prendre les commissions scolaires pour cible.

«Ils sont tous devenus fous (...) ça n'a pas de sens ce qui est en train de se passer dans la politique québécoise, de vouloir déconstruire un système d'éducation qui somme toute a produit des effets importants pour la société», a-t-il pesté.

La CSQ pourra compter sur l'opposition péquiste dans sa lutte pour «sauver» les commissions scolaires.

Ces dernières jouent un rôle essentiel pour assurer une distribution équitable des ressources sur l'ensemble du territoire, a fait valoir le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation, Sylvain Gaudreault.

«La grande vertu des commissions scolaires, c'est l'équité sur le territoire. Je veux bien donner plus de pouvoirs aux écoles mais il faut s'assurer d'une équité dans les ressources», a-t-il dit.

Le député de Jonquière soupçonne le gouvernement de vouloir, «sans le dire», faire payer aux commissions scolaires le prix de sa lutte au déficit.

Si la ministre Beauchamp veut réellement alléger la bureaucratie trop lourde, elle n'a qu'à abolir les Directions régionales du ministère de l'Éducation, a soutenu M. Gaudreault.

«C'est là que se trouve la bureaucratie», a-t-il évoqué.

Quant à elle, la chef péquiste Pauline Marois a dit prendre la sortie de Mme Beauchamp «avec un grain de sel».

Alors que s'amorce le congrès du Parti libéral du Québec (PLQ), le gouvernement tente manifestement de retenir dans le giron du PLQ des militants intéressés par les idées de M. Legault, a analysé Mme Marois.

Au-delà des considérations partisanes, la leader péquiste a invité le gouvernement à réinvestir dans les services éducatifs avant de s'attaquer aux structures.

«Avant de vouloir revoir les structures, il y a nécessité de réinvestir davantage auprès des professionnels et des jeunes», a-t-elle soulevé.