Les écoles francophones de Montréal débordent, causant des maux de tête aux administrateurs. À elle seule, la Commission scolaire de Montréal aura besoin de 400 nouvelles classes d'ici quatre ans pour faire face à l'augmentation de la clientèle.

Les secteurs de Rosemont, Notre-Dame-de-Grâce et Bordeaux-Cartierville sont particulièrement touchés. Résultat: des élèves doivent être déplacés. Les parents de cinq élèves de l'école Saint-André-Apôtre, dans le quartier Bordeaux-Cartierville, ont ainsi appris à la fin mai que leurs enfants ne pourraient faire leur 3e année à cette école l'automne prochain, faute de place.

Dans une lettre que La Presse a obtenue, ils demandent aux commissaires et à la direction de l'école de revoir leur décision. Ils ont reçu l'appui de plus de 70 parents. «Nous demandons un peu de souplesse. Trois des cinq enfants déplacés sont suivis par un orthopédagogue parce qu'ils ont certaines difficultés. Quelles sont leurs chances de réussite si on les change d'école? Ils doivent faire le deuil de leurs amis, de leur milieu», déplore Lyne Bisson, la mère de l'un des élèves.

La décision a finalement été annulée en fin de journée hier, au bonheur des parents. Les commissaires, aux prises avec ce problème depuis plusieurs semaines, ont plutôt décidé d'ouvrir une autre classe de 3e année.

«Une décision comme celle-là est très difficile à prendre parce qu'elle implique beaucoup de choses», explique le commissaire de Bordeaux-Cartierville et vice-président du comité de direction de la CSDM, André Gravel. «Nous pensons qu'ajouter une classe est la bonne décision dans les circonstances, mais elle comporte des inconvénients. L'équipe-école va devoir se réorganiser, il y aura plus de monde dans l'école.»

Au moment où des écoles anglophones et de petites écoles en région éloignée sont aux prises avec une baisse de clientèle au point de devoir fermer leurs portes, comme l'a révélé La Presse hier, des écoles de la grande région de Montréal ont le problème inverse.

La baisse du rapport élèves-maîtres décrétée par le Ministère, conjuguée au mini-baby-boom, à une hausse de l'immigration et, dans une moindre mesure, au déplacement de la population vers les grands centres, a un impact direct sur la hausse du nombre d'élèves.

Une nouvelle donnée s'ajoutera également dès la prochaine rentrée scolaire puisque, dans le calcul du rapport élèves-maîtres, un élève atteint d'un trouble envahissant du développement (TED) comptera pour trois enfants. Cette décision ministérielle allège la tâche des enseignants, mais elle réduit le nombre d'élèves par classe.

Manque de locaux

La nouvelle de l'ouverture d'une autre classe de 3e année à l'école Saint-André-Apôtre a été accueillie avec soulagement hier par les parents concernés, mais les commissaires savent déjà que le problème se répétera dès l'automne 2012.

Toutes les écoles à proximité sont pleines. Certaines ne pourront plus accepter de nouvelles inscriptions à la maternelle, du moins d'élèves qui ne sont pas du secteur immédiat.

«Depuis quelques années, c'est très difficile. Nous devons marcher à cadence accélérée pour éviter l'entassement des élèves», indique M. Gravel.

Tous les locaux sont réquisitionnés. Certaines écoles perdent leur bibliothèque. Ailleurs, ce sont les locaux des enseignants spécialistes -professeurs d'anglais, de musique ou d'art dramatique- qui sont transformés en classes.

Parfois, on ajoute carrément des unités préfabriquées. Ce fut le cas l'an dernier à l'école Gilles-Vigneault et à l'école Saint-Albert-le-Grand.

À la prochaine rentrée scolaire, les écoles Sainte-Odile et François-de-Laval feront de même pour aménager sept classes au total.

Les investissements majeurs annoncés au printemps par la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp, pour la construction et l'agrandissement d'écoles ne sont pas suffisants.

La CSDM, qui prévoit accueillir 10 000 élèves de plus dans les 10 prochaines années, lorgne les locaux qui pourraient se libérer du côté anglophone, notamment à l'école Nesbitt, menacée de fermeture.

«On laisse les commissions scolaires anglophones faire leurs devoirs avant tout. On ne veut surtout pas mettre de pression», précise le responsable des communications à la CSDM, Alain Perron, en ajoutant que la décision revient à la ministre.