La recommandation sur l'enseignement de l'anglais langue seconde de façon intensive dès la 6e année du primaire, formulée mercredi par le premier ministre Jean Charest, est largement inspirée de celle d'un souverainiste réputé... Gérald Larose, il y a de cela 10 ans.

L'ancien président de la CSN avait aussi présidé, en 2000 et 2001, la Commission des États généraux sur la situation et l'avenir de la langue française. Son rapport avait d'ailleurs été remis à l'ancienne ministre péquiste responsable de la Charte de la langue française... Diane Lemieux, qui vient d'être nommée présidente de la Commission de la construction par le gouvernement Charest.

Or, dans le rapport de 300 pages qu'il avait rendu public, en juin 2001, M. Larose recommandait justement d'enseigner l'anglais langue seconde de façon intensive à la fin du primaire.

M. Larose recommandait que le mode d'enseignement de l'anglais langue seconde soit remplacé, «au dernier cycle du primaire, au milieu et à la fin du secondaire, par un enseignement concentré avec création d'un environnement culturel anglais».

Or, mercredi, dans son message inaugural, M. Charest a proposé que d'ici cinq ans, tous les enfants de la 6e année du primaire reçoivent la moitié de leur enseignement en anglais.

«Concentrer l'anglais dans une demi-année, en 6e année du primaire, c'est ce que nous proposions à l'époque», il y a 10 ans, a confirmé en entrevue jeudi M. Larose.

M. Larose ne pavoise toutefois pas et ne crie pas non plus à la récupération politique de son idée sans qu'il en ait le crédit.

Il dit seulement souhaiter que, cette fois, la mesure soit bel et bien implantée et qu'elle ne soit pas seulement de la poudre aux yeux lancée dans un message inaugural. «Ce dispositif va prendre du temps à se mettre en place, alors il se peut que ce soit purement raccoleur», estime M. Larose.

Avant d'applaudir, il pose toutefois une condition: que l'enseignement de l'anglais, s'il se fait de façon concentrée en 6e année, ne se fasse pas également avant cette 6e année.

«L'inquiétude que j'ai, c'est: est-ce qu'ils vont jouer sur les deux tableaux, c'est-à-dire maintenir un apprentissage très tôt et ajouter une concentration? Alors là, c'est le billet pour l'assimilation, c'est le billet pour la confusion, en laissant comme message que finalement, le futur des individus, comme de la société, ce n'est pas le français, c'est l'anglais», prévient M. Larose.

Selon lui, le message doit être que l'anglais est «un atout de plus, non pas une obligation» pour vivre et s'épanouir au Québec. «Il faut que l'anglais soit un atout quand on l'a et, quand on ne l'a pas, il ne faut pas que ce soit un handicap. C'est ça le projet de la Loi 101», opine M. Larose.