De 90 millions qu'il était il y a quelques mois, le déficit accumulé de l'Université Laval s'établit maintenant à 306 millions en raison des «principes comptables généralement reconnus» que doivent désormais appliquer toutes les universités du Québec.

Jusqu'ici, la comptabilité des universités se faisait à l'aune de principes établis par le ministère de l'Éducation.

L'Université Laval a donc ouvert le bal et dévoilé ses nouveaux chiffres aux journalistes, hier, histoire qu'ils ne paniquent pas à la vue de cette nouvelle réalité «artificielle», comme l'a qualifiée Éric Bauce, vice-recteur à la direction et au développement.

Ce chiffre de 306 millions et ces principes comptables ne donnent donc pas le portrait global, selon la direction.

Comme l'explique Josée Germain, vice-rectrice à l'administration et aux finances, l'Université a une comptabilité par fonds. Ces 306 millions n'incluent pas, par exemple, le fonds de recherche ni le fonds de dotation (les dons faits à l'Université), pas plus que les rénovations et les immobilisations, lesquelles sont, elles, prises en compte par le ministère de l'Éducation.

Ce qu'inclut en grande partie le déficit accumulé de 306 millions, finalement, ce sont les engagements à l'égard de l'ensemble des retraités, actuels et futurs.

C'est ce qui fait dire à Éric Beauce que ce déficit est artificiel, dans la mesure où il est causé en grande partie par les déboires de la Bourse et la baisse des taux d'intérêt. Avec un peu de chance, selon lui, les choses vont se redresser.

«Du point de vue de la gestion, cela ne nous inquiète pas», a dit M. Bauce, puisque l'Université Laval ne manque pas d'actif, après tout: son campus vaut notamment 2,4 milliards, a-t-il noté.

Peut-être, mais l'Université Laval pourrait-elle envisager de vendre un pavillon ou une autre parcelle de son campus? La réponse n'a pas tardé: «C'est un patrimoine que nous entendons conserver», a dit Éric Bauce.

«Ce ne serait pas une solution à long terme», a enchaîné Josée Germain.

Professeur d'économie à l'Université de Montréal et membre du groupe de recherche CIRANO, Claude Montmarquette s'étonne de ce que l'Université Laval parle d'un déficit creusé artificiellement. «Si c'est si virtuel que cela, pourquoi en parlent-ils, alors?»

«Le fait est que le problème ne disparaîtra pas de lui-même. La caisse risque au contraire de devenir encore plus déficitaire. Soit il faudra augmenter les cotisations au régime de retraite, soit il faudra réduire les prestations.»

Le problème disparaîtra d'autant moins par lui-même, fait remarquer M. Montmarquette, que «plus personne ne s'attend à ce que les rendements boursiers reviennent à 10%».