Dès l'an prochain, la Commission scolaire de Laval retranchera neuf groupes d'élèves en difficulté d'apprentissage de ses écoles et intégrera ces enfants dans les classes ordinaires.

Pour le Syndicat de l'enseignement de Laval, cette situation est inacceptable. Plusieurs enseignants lavallois ont d'ailleurs participé à la journée de grève de la Fédération autonome de l'enseignement, mardi. L'une des revendications des 32 000 grévistes est justement de mettre un frein à l'intégration massive de jeunes en difficulté.Selon le document Offre de service d'enseignement 2010-2011 de la Commission scolaire de Laval, neuf groupes d'élèves en difficulté d'apprentissage disparaîtront l'an prochain. «Nous, ce qu'on demande, c'est au contraire d'avoir plus de ces classes pour en faciliter l'accès! déplore la première vice-présidente du Syndicat de l'enseignement de Laval, Claudine Lefebvre. On veut notamment des classes spéciales pour les petits de 6 et 7 ans. Il n'y en a pas, actuellement. L'an dernier, 216 enfants de 6 et 7 ans auraient eu besoin d'une place dans ces classes qui n'existent pas.»

«La Commission scolaire semble ignorer les effets bénéfiques d'une intervention précoce chez les enfants en difficulté. Il y a 27 groupes pour élèves en difficulté d'apprentissage pour nos 21 000 enfants du primaire alors que, au secondaire, il y a 70 groupes pour 16 400 élèves. Notre système crée des élèves en difficulté», plaide le responsable de l'adaptation scolaire au Syndicat de l'enseignement de Laval, Guy Bellemare.

Selon Mme Lefebvre, la Commission scolaire de Laval justifie la fermeture de ces groupes en disant que la demande est trop faible. La Commission scolaire n'a pas rappelé La Presse. «Mais seulement l'an dernier, au moins 20 demandes d'une place dans ces classes spéciales ont été rejetées. L'accès à ces groupes est volontairement restreint, dénonce Mme Lefebvre. Le ministère de l'Éducation dit qu'il veut mettre un frein à l'intégration. Alors pourquoi ferme-t-on des classes spéciales à Laval?»

Grève mardi

Freiner l'intégration massive des élèves en difficulté est au coeur des revendications de la Fédération autonome de l'enseignement (FAE). Mardi, les 32 000 membres de la FAE étaient en grève pour dénoncer la lenteur des négociations avec Québec. À l'heure du midi, 10 000 enseignants munis de pancartes se sont massés dans la rue University, entre le boulevard De Maisonneuve et la rue Sherbrooke.

«On n'est pas là pour demander un meilleur salaire. On est là pour améliorer le climat dans nos classes en mettant un frein à l'intégration et en ayant plus de services de soutien», a expliqué Gabrielle Boucher, qui enseigne dans une classe spécialisée de maternelle à l'école l'Arc-en-ciel de Laval.

Enseignant d'éducation physique à l'école secondaire de Pointe-aux-Trembles, Philippe Gélinas dit souhaiter de plus petits rapports profs/élèves. «Parfois, on a jusqu'à 43 élèves dans un groupe! Ça n'a pas de sens!» dit-il.

La grève de mardi aura mis en congé forcé plus de 300 000 enfants dans la région de Montréal, à Laval, en Montérégie et en Outaouais.

Rencontrés mardi matin aux abords du Centre des sciences de Montréal, Nicolas et sa grand-maman Jeanette prévoyaient passer une belle journée. Mais la grand-mère ne se réjouissait tout de même pas de cette grève: «Ça ne servira à rien, dit-elle, parce que Jean Charest ne changera pas d'idée!»

Le petit Antoine, accompagné de ses parents, semblait lui aussi bien heureux de manquer l'école. Mais sa maman comprend mal la décision des enseignants de faire la grève en fin d'année. «Ils veulent enseigner mieux, mais là, ils n'enseignent tout simplement plus!» dit-elle.

Le président de la FAE, Pierre Saint-Germain, estime que les propositions gouvernementales ne sont pas suffisantes. «On veut négocier de bonne foi. Mais ça ne va pas assez vite, actuellement», dit-il.

Grève «prématurée», dit Courchesne

L'autre syndicat d'enseignants du Québec, la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE), est arrivé à une entente la semaine dernière avec le gouvernement. Qualifiant la grève de la FAE de «prématurée», la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, a déclaré mardi que «le rythme des négociations avec la FAE a été beaucoup plus lent qu'avec la FSE» et qu'il faut donc l'«intensifier».

La FAE réplique que la réalité de ses membres, en majorité dans la région de Montréal, est différente de celle de la FSE. Mais M. Saint-Germain assure qu'il est prêt en tout temps à négocier avec Québec. Il ajoute qu'il est peu probable qu'un autre débrayage ait lieu d'ici à la fin de l'année. «Mais s'il n'y a pas d'entente, il risque d'y avoir autre chose à la rentrée», prévoit M. Saint-Germain.

Mme Courchesne se dit quant à elle «optimiste» quant à la possibilité d'arriver à une entente avant la fin de juin.