Plus de 16% des jeunes de 16 à 24 ans qui fréquentent l'éducation des adultes ont des problèmes de comportement graves, dits «cliniques», selon une étude menée par Julie Marcotte, professeure au département de psychoéducation de l'UQTR.

Il s'agit de problèmes extériorisés (agressivité, délinquance) ou intériorisés (anxiété, dépression, somatisation), qu'il faut mieux reconnaître et traiter si on veut assurer leur succès scolaire.

C'est une enquête menée auprès de 381 jeunes inscrits à l'éducation des adultes de six commissions scolaires qui a permis à Mme Marcotte de faire ce constat. Auparavant psychologue dans un centre d'éducation des adultes, elle y avait rencontré «des jeunes aux prises avec des problématiques incroyables, dit-elle en entrevue. Ils avaient été soutenus pendant toute leur adolescence mais, arrivés à 18 ans, il y avait peu de services vers lesquels les diriger».

Actuellement au Québec, plus de 55 000 jeunes de 16 à 24 ans suivent des cours de niveau secondaire à l'éducation des adultes, selon le ministère de l'Éducation (2005-2006). Ces jeunes forment 73% d'une clientèle qui est beaucoup moins «adulte» qu'autrefois.

Le profil de la cohorte de Mme Marcotte donne une idée des leurs difficultés: 33% ont été placés en classe spéciale au secondaire, 15% ont vécu en centre ou en famille d'accueil et seuls 62% perçoivent un soutien familial «moyen à élevé».

Cela dit, «la majeure partie de l'échantillon est formée de jeunes qui n'ont pas de problèmes majeurs», a nuancé la professeure.

Délinquance

Il reste que les jeunes ayant des problèmes de comportement «cliniques» sont surreprésentés, puisqu'ils comptent pour 16% du groupe, comparativement à 2% dans la population générale.

Les 16-17 ans sont encore plus nombreux à souffrir d'un problème en particulier, par exemple les troubles de la pensée (pensées bizarres, hallucinations auditives), qui touchent 29% des garçons et 22% des filles de cet âge. Un taux étonnant, selon la professeure.

Les garçons de 16-17 ans ont souvent des comportements délinquants (41%, contre 29% des filles), agressifs (19%) et des problèmes d'attention (24%).

Quant aux filles de cet âge, 25% font de la somatisation (elles ressentent un malaise en raison du stress). «C'est beaucoup», commente Mme Marcotte.

Chez les 18-24 ans, les problèmes de comportement diminuent nettement.

Sauf pour les troubles intériorisés, qui touchent 21% des femmes, une augmentation de 9% par rapport aux filles de 16-17 ans.

Ce qui distingue le groupe ayant des problèmes de comportement «cliniques» des autres? Une moins bonne relation avec leur mère, une moins bonne moyenne à l'école et une plus grande possibilité d'avoir vécu de l'abus ou de la négligence, révèle l'étude.

Les besoins des femmes

Il faut mieux détecter et orienter ces jeunes en étant attentifs aux besoins des femmes, pour qui la réussite scolaire constitue un tremplin et un facteur de protection particulièrement puissants, selon la chercheuse. «Depuis deux ou trois ans, il y a une volonté d'offrir plus de services à l'éducation des adultes, note-t-elle. Mais c'est très disparate au plan du financement.»

«L'éducation des adultes est un milieu qui est assez oublié, poursuit Mme Marcotte. C'est dommage parce qu'il y a de belles réussites. Pour certains jeunes qui ont des difficultés majeures, c'est la dernière fois qu'on est en contact avec eux et qu'on peut leur ouvrir des portes vers une non-marginalisation.» La deuxième phase de l'étude, qui suit l'évolution des élèves un an plus tard, est en cours.

Problèmes de comportement

> Filles - 16-17 ans

Comportements délinquants: 28,8%

Somatisation: 25,4%

Problèmes de la pensée: 22%

> Garçons - 16-17 ans

Comportements délinquants: 40,5%

Problèmes de la pensée: 28,6%

Problèmes d'attention: 23,8%

Comportements agressifs: 19%

Source: Les difficultés des jeunes 16-24 ans à l'éducation des adultes: portrait de la situation, par Julie Marcotte de l'UQTR, Richard Cloutier, de l'Université Laval, et Laurier Fortin, de l'Université de Sherbrooke.