C'est l'école secondaire publique la plus multiethnique de l'île de Montréal. À l'école La Voie, dans Côte-des-Neiges, neuf élèves sur 10 sont soit nés à l'étranger, soit nés ici de deux parents immigrés. Cela ne les empêche pas de réussir: leur taux de promotion frôle les 80 %. Il y a cinq ans, il était 22 % plus bas.

Un grand coup de barre a été donné depuis. «On travaille très fort, dit Roseline Rouaud, directrice de l'établissement de 1000 élèves, et on a d'assez bons résultats.»

 

La priorité a été donnée au français, peu parlé en dehors des classes. Des heures supplémentaires de français ont été ajoutées à l'horaire, sans compter la récupération offerte le... samedi. «Deux cents jeunes s'y inscrivent chaque année», souligne Félix Pauléus, enseignant de français. Résultat: la moyenne a bondi de 52 % à 67 % en quatre ans aux épreuves finales de français du ministère de l'Éducation.

«Les professeurs s'engagent beaucoup», constate Hadiatou Barry, une jeune élève de 16 ans venue de Guinée. Elle-même a fréquenté l'école le samedi, pour travailler ses mathématiques. «Ici, il y a beaucoup de monde qui n'est pas nécessairement de la même culture que nous, mais l'école fait qu'on s'adapte bien, poursuit Avin Ahmad, 16 ans, Kurde d'origine syrienne. C'est comme une deuxième famille.»

La Voie a la chance d'accueillir des jeunes de 80 nationalités sans qu'aucune ne soit surreprésentée. «La ghettoïsation, il n'y en a pas, et c'est une richesse», dit M. Pauléus.

«Avant de venir à La Voie, j'entendais les rumeurs qui disaient qu'il y avait du racisme, de la drogue, des batailles de gangs de rue, se souvient Lou-Micah Castillo, un élève de 16 ans dont les parents ont immigré des Philippines. J'ai été surpris de plutôt rencontrer des élèves impeccables et intelligents.»

Il faut dire que l'encadrement a été resserré: le moindre retard entraîne une retenue, la moindre absence est signalée aux familles, ce qui a réduit leur nombre du tiers. «L'appui des parents est une des causes de notre réussite, dit Mme Rouaud. Ils croient en l'éducation comme tremplin pour leurs enfants.»

Les ados de La Voie - qui ont souvent connu la guerre, l'errance et la pauvreté - ont pourtant leur lot de soucis. «À mon arrivée ici, la forme de désespérance psychologique qu'il y avait chez certains jeunes m'a frappée», se rappelle la directrice. Un appel aux organismes communautaires du quartier a permis de mettre un peu de baume sur les plaies.

Restait à éloigner les jeunes des tentations de la Plaza Côte-des-Neiges, ce qui a été fait en offrant une panoplie d'activités le midi et après les cours. «On a maintenant du mal à leur faire quitter l'école le soir!» se réjouit la directrice, qui ne craint pas de patrouiller les corridors pour prendre le pouls de son école.

«J'ai envie que cette école continue d'avancer», fait-elle valoir.