Le gouvernement Harper a reçu des signaux d'alarme sur l'état de la Montreal Maine&Atlantic Railway dans les mois qui ont précédé la tragédie ferroviaire de Lac-Mégantic, révèlent des documents obtenus par La Presse grâce à la Loi sur l'accès à l'information. Parmi ceux-ci, une lettre des élus de Lac-Mégantic - envoyée huit mois avant le drame - qui prévient Ottawa que leur municipalité risque des subir des «dommages considérables» si des réparations ne sont pas faites rapidement.

Huit mois avant la tragédie ferroviaire qui a coûté la vie à 47 personnes, la Ville de Lac-Mégantic avait envoyé une mise en garde explicite à la Montreal Maine&Atlantic ainsi qu'à deux ministres du gouvernement Harper sur l'état d'un tronçon de chemin de fer sur son territoire. Une lettre dans laquelle elle disait craindre des «dommages considérables» advenant un déraillement.

Le 12 novembre 2012, la greffière de la Ville a expédié une lettre à la société ferroviaire ainsi qu'aux ministres Denis Lebel, alors titulaire des Transports, et Christian Paradis, alors lieutenant de Stephen Harper au Québec, pour les informer d'une résolution adoptée par le conseil municipal une semaine plus tôt.

La résolution précise que le chemin de fer a été endommagé par des pluies abondantes survenues quatre ans plus tôt, en 2008, et que les travaux correctifs doivent être effectués. La MRC du Granit, qui vient alors d'inspecter la voie ferrée, a constaté «des problèmes au niveau de la stabilité de certains tronçons des voies ferrées sur le territoire de la Ville de Lac-Mégantic».

Le fait que les wagons-citernes sont de plus en plus nombreux à circuler sur les rails de la MMA n'a pas échappé aux élus municipaux. Cette phrase prophétique de la résolution en témoigne:

«Un déraillement de wagon contenant des produits toxiques ou des contaminants à cet endroit est susceptible de causer des dommages considérables, et ce, considérant la proximité des résidences et du lac Mégantic.»

À la Ville de Lac-Mégantic, on précise que la résolution visait à corriger l'érosion d'un talus supportant le chemin de fer à l'extrémité nord de la ville. MMA avait tenté de corriger le problème à quelques reprises depuis 2008. Elle l'a fait une fois pour toutes quelques semaines après l'adoption de la résolution.

«À ce moment-là, ils ont réagi très rapidement, explique le directeur général de Lac-Mégantic, Gilles Bertrand. Dans le mois qui a suivi, c'était réparé et ce l'était de façon professionnelle. Ça a été très bien fait.»

Ottawa intervient

Le bureau du ministre Denis Lebel s'est également mêlé du dossier, indique une lettre que son bureau a fournie à La Presse. Un employé de Transports Canada a contacté la MMA quelques semaines après la lettre de Lac-Mégantic. L'entreprise lui a assuré que les travaux correctifs avaient été faits dans la semaine du 17 décembre.

Nous sommes alors un peu plus d'un mois après la lettre de la greffière de Lac-Mégantic.

«Un inspecteur régional du Ministère s'est rendu sur les lieux le 20 décembre 2012 et il a pu constater que les travaux avaient effectivement été réalisés», a écrit M. Lebel dans sa réponse à la Ville de Lac-Mégantic, datée de janvier 2013.

La Presse n'a pu obtenir les commentaires de la MMA hier.

- Avec William Leclerc