Lin Jun a perdu beaucoup de sang lorsqu'il se trouvait sur le lit dans l'appartement de Luka Rocco Magnotta. Son sang a aussi été retrouvé sur les outils qui auraient servi à le tuer et à le démembrer.

C'est ce qui se dégage du témoignage que la biologiste judiciaire Jacinthe Prévost a rendu, hier, au procès de M. Magnotta. La biologiste a été appelée à se rendre au 5720, boulevard Décarie, le 30 mai 2012, en pleine nuit, pour réaliser des prélèvements et des expertises dans l'appartement 208. Les enquêteurs soupçonnaient que cet appartement avait un lien avec le torse et les membres trouvés dans les ordures près de l'immeuble, une quinzaine d'heures plus tôt.

Mme Prévost est arrivée sur place à 1h45 cette nuit-là. Elle a été avisée qu'une vidéo qui semblait reliée au meurtre et à l'appartement circulait. Elle a voulu la voir avant d'entrer dans l'appartement, croyant que cela pourrait l'aider à analyser la scène. Elle se souvient que la vidéo montrait entre autres un corps sur le lit, un individu partiellement caché par un capuchon qui poignardait un corps, des gestes sexuels exécutés sur le cadavre, un chien noir et blanc sur une portion de cuisse, un bras droit dans le congélateur...

Des taches de sang visibles

En entrant dans l'appartement, elle a constaté que celui-ci était presque vide, à l'exception de quelques meubles et d'un chapeau dans le fond du placard. L'endroit avait été nettoyé, mais du sang subsistait en différents endroits. À l'oeil nu, on pouvait en voir des traces ou des gouttes sur les murs du salon, dans le corridor, sur la table de la cuisine, dans la cuisine et la salle de bains... Il y en avait beaucoup dans le frigo, sous le tiroir à légumes, et il y en avait des traces dans le congélateur. L'utilisation de luminol a fait ressortir qu'il y en avait également eu beaucoup dans la baignore et le lavabo.

Du sang sur le matelas

Le lit était recouvert d'un drap-housse brun, manifestement neuf, sous lequel se trouvait un rideau de douche bourgogne. Une fois mis à nu, le matelas apparaissait taché de sang et d'une substance blanche (peut-être du nettoyant). Le sang avait imbibé le matelas au point de créer une grande mare sur l'autre face de celui-ci. Le sang était pourri, si bien qu'il ne pouvait être analysé, a expliqué Mme Prévost. Par contre, les nombreuses autres analyses faites ailleurs dans l'appartement démontrent qu'il s'agissait du sang de Lin Jun. 

Son sang a aussi été retrouvé sur des vêtements dans les ordures. L'ADN de Magnotta s'y trouvait aussi souvent, et parfois son sperme. C'était le cas pour un kangourou mauve.

De la chair sur les outils

Différents outils ont été récupérés dans les sacs à ordures - couteaux, scie électrique, marteau, tournevis... Le sang de Lin Jun était présent sur ces outils. Il y avait aussi de la chair sur la scie oscillante électrique, celle que Me Luc Leclair a actionnée dans la salle d'audience vendredi dernier.

Les fines gouttelettes de sang sur le calorifère démontrent que la victime a été frappée avec force, a indiqué Mme Prévost. «Ce genre de gouttelette ne voyage pas loin», a expliqué le témoin. Du sang de la victime était aussi visible sur l'affiche du film Casablanca retrouvée dans les ordures.

Une bouteille de vin australien portant le nom de «Wish for Love» a été récupérée dans les ordures. Elle aurait servi à sodomiser le cadavre et portait l'ADN de Lin Jun sur le goulot, a signalé le témoin.

Me Luc Leclair amorcera son contre-interrogatoire de Mme Prévost aujourd'hui.

Rappelons que M. Magnotta est accusé du meurtre prémédité de Lin Jun, d'outrage à son cadavre, de possession et diffusion de matériel obscène, d'utilisation de la poste pour diffuser du matériel obscène et de harcèlement envers le premier ministre Stephen Harper et les membres de son gouvernement.

M. Magnotta admet avoir commis les gestes qu'on lui reproche, mais présentera une défense de troubles mentaux. Son avocat tentera de démontrer qu'il ne peut être tenu criminellement responsable de ses actes.