La mission militaire canadienne en Afghanistan arrive à son terme. Les 100 derniers soldats, qui participent à un déploiement de près de trois ans destiné à former l'armée afghane, doivent rentrer au pays ce mois-ci, mettant officiellement fin à 12 ans d'implication dans ce pays d'Asie.

Les différentes missions, y compris les cinq années d'opérations de combat à Kandahar, ont coûté la vie à 158 soldats, deux consultants, un diplomate et un journaliste.

Avec ce retrait surviennent de nouvelles questions à propos du niveau de préparation du Canada pour cette guerre - particulièrement en 2005, avec la décision d'envoyer des troupes à Kandahar, le coeur de l'insurrection talibane.

L'ancienne responsable des efforts humanitaires canadiens en Afghanistan affirme que le gouvernement libéral de Paul Martin avait, à l'époque, décidé d'envoyer des soldats à Kandahar avant que les responsables sur le terrain eurent complété leur mission de reconnaissance.

Au dire de Nipa Banerjee, le choix consistait alors à consacrer les efforts d'aide et de reconstruction à Kandahar, ou dans la région plus paisible de Herat.

«Les raisons justifiant cette décision et l'identité de la personne ou du ministère responsable de celle-ci n'ont jamais été clairement établies», a-t-elle déclaré lors d'une récente entrevue accordée à La Presse Canadienne.

La guerre subséquente - et sanglante - menée ensuite pendant cinq ans dans la province de Kandahar en est venue à occuper le point central de l'expérience du pays en Afghanistan.

Jusqu'en 2005, pourtant, l'implication d'Ottawa dans cette terre désolée d'Asie centrale était largement passée sous le radar, à quelques exceptions près.

Les troupes d'élite canadiennes ont débarqué en secret en Afghanistan avec leurs collègues américains à la fin de 2001 pour chasser les vestiges d'al-Qaïda et leurs hôtes talibans. Des photos de ces soldats transportant des prisonniers à l'extérieur d'un avion de transport avaient mis le ministre de la Défense d'alors, Art Eggleton, sur la sellette.

Le déploiement d'un groupe de combat à Kandahar au printemps 2002, y compris la mort de quatre soldats canadiens à la suite d'un bombardement américain, a catapulté la guerre en une. Mais lorsque les Canadiens se sont déployés à Kaboul entre 2003 et 2005, l'attention envers la guerre a diminué, ne connaissant un regain que lorsque des militaires perdaient la vie.

La notion voulant que la solution passe par un retour à Kandahar fait l'objet de débats depuis des années, depuis qu'un ancien libéral haut placé a tenté de blâmer le général à la retraite Rick Hillier pour cet embourbement.

M. Hillier a été accusé d'avoir tordu un bras à Paul Martin pour accepter une mission d'un an, qui est devenue une guerre de guérilla de cinq ans.

La rencontre de 2005 entre une équipe de reconnaissance canadienne et des militaires américains à propos d'une implication d'Ottawa à Kandahar, dont Mme Banerjee n'a jamais discuté publiquement avant aujourd'hui, jette un nouvel éclairage sur la façon dont s'est déroulée cette mission de combat.

Il s'agit de l'un des rares moments servant à souligner à quel point le gouvernement libéral d'alors était mal préparé alors qu'il s'est maladroitement engagé dans le conflit le plus coûteux et le plus violent du pays depuis la Guerre de Corée.

L'une des plus importantes décisions de l'époque en matière d'Affaires étrangères a été prise avant même que l'équipe de reconnaissance effectuant des recherches eût le temps d'analyser ce qui serait dans le meilleur intérêt du pays.

Des responsables de l'ancien département asiatique de l'Agence canadienne de développement international étaient «surpris et fâchés» que la décision eut été prise sans un processus de consultation approprié, mentionne Mme Banerjee.

Si elle a présenté cette idée comme logique en raison de la pauvreté affligeante de la province, elle mentionne qu'elle aurait dû réaliser plus rapidement que l'étrange absence des organisations humanitaires internationales était due à la violence omniprésente dans ce lieu de naissance des talibans.

Ce recul des ONG s'est d'ailleurs accéléré au printemps 2006, lorsque quatre de leurs employés ont été enlevés et tués.

Selon les réponses officielles données à l'époque, le Canada et la communauté internationale ont été surpris par l'ampleur et la vigueur de l'insurrection talibane dès 2007. Des recherches effectuées par les Affaires étrangères et la Défense révèlent toutefois que des services américains de renseignement avaient mis en garde l'armée canadienne en 2005 contre des talibans plus forts et une contre-attaque de leurs forces en compagnie d'al-Qaïda dans le sud de l'Afghanistan pour coïncider avec l'arrivée des troupes de l'OTAN.