Guy Martin

Âge:40 ans

Grade:sergent, 5e Bataillon des services du Canada

Son expérience en Afghanistan:il a été déployé entre novembre 2010 et juillet 2011 à Kandahar, où il a été opérateur mobile de matériel de soutien.

Pour sa première mission en Afghanistan, Guy Martin a vu ce que peu de militaires canadiens ont vu: le passage du relais pour la fin de la mission de combat. Les anciennes bases canadiennes sont aujourd'hui occupées par les troupes américaines. «Le dernier camp qu'on a fait, c'est simple, il ne restait que six Canadiens», dit-il.

Pendant son tour, il a sillonné les routes afghanes pour réapprovisionner les troupes. En tout, il a participé à 30 convois.

«C'était intense par rapport à la charge de travail, mais aussi par rapport à l'importance du travail. Là-bas, ce n'est pas un entraînement. C'est réel», dit-il. Il a aussi participé à des activités de mentorat avec l'armée afghane. «Les gens sont fiers et autodidactes. La majorité ne sait ni lire ni écrire», raconte-t-il. À son étonnement, les soldats ont été très dévoués à leur apprentissage. «Je m'attendais à ce qu'ils soient réfractaires.»

Le sergent Martin a participé à cinq missions à l'étranger au cours de sa carrière avec les Forces armées, à Chypre, en ex-Yougoslavie, notamment. Mais l'Afghanistan reste unique. «On ne voit ça qu'une seule fois dans notre vie, une mission de combat. La différence importante, c'est qu'en Afghanistan, on était en guerre. Pour les plus vieux, tout ce qu'on avait appris, on le voyait réellement sur la ligne de front.»

Et il a même vu des choses qui ne s'apprennent pas. Sur une route, le convoi dont il fait partie heurte accidentellement un homme en moto, qui roule avec une petite fille. Tout le convoi s'arrête; un périmètre de sécurité est aussitôt érigé. Mais les villageois s'approchent. La tension monte. «C'est stressant de voir 75 personnes autour de soi. Malheureusement, avec les Afghans, on ne peut pas savoir qui est de notre bord ou pas», se souvient M. Martin.

L'interprète présent avec l'armée américaine sait comment dénouer la tension; il demande à ce que l'aîné du village puisse voir le blessé. Ce qui est fait. Les villageois se dispersent ensuite. «On écoutait beaucoup les interprètes pour avoir une bonne compréhension des choses. Avoir toutes les chances de ne pas froisser la culture.»

Revenu depuis quelques mois au Québec, le sergent Guy Martin prend à peine la mesure de la tension qui l'a habitée pendant son passage en Afghanistan. Y retournerait-il? Il hésite.

«C'est difficile à dire. J'ai quelque chose, à l'intérieur... ce n'est pas la peur... Mais je ne ferme pas la porte. C'est une expérience qu'on ne peut avoir nulle part ailleurs.»