Au lendemain de la rebuffade du premier ministre Stephen Harper à l'égard d'Hamid Karzaï, critiqué pour une série de déclarations controversées, le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, a pris lui aussi ses distances avec le président afghan.

Alors qu'Ottawa a toujours appuyé le gouvernement Karzaï, le ministre Cannon a soutenu hier que l'engagement du Canada était plutôt «envers le peuple afghan», se gardant bien de réitérer son appui à l'administration du président.

 

Interrogé pour savoir s'il avait toujours confiance en Hamid Karzaï pour diriger l'Afghanistan, le ministre des Affaires étrangères s'est contenté de répondre qu'il était «le président dûment élu» de ce pays.

«C'est lui qui est le chef du gouvernement. Il doit répondre à ses concitoyens, a dit M. Cannon. J'ai trouvé que ses propos sont inacceptables, dans les circonstances. Néanmoins, ça ne nous empêche pas de continuer à faire le travail que nous nous sommes engagés à faire.» «Et nous allons continuer à le faire jusqu'à ce que nos troupes se retirent en 2011», a-t-il ajouté, réagissant pour la première fois, hier, aux déclarations-chocs du président Karzaï, qui a notamment critiqué l'«ingérence» des pays occidentaux dans les affaires internes de l'Afghanistan. Il serait allé jusqu'à affirmer qu'il pourrait être tenté de se rallier aux talibans, selon des décideurs qui ont assisté à une rencontre, samedi dernier. Les propos ont depuis été niés par un porte-parole, qui a réitéré l'engagement du gouvernement Karzaï dans la lutte contre les talibans.

Le ministre Cannon a tout de même jugé opportun de demander à l'ambassadeur du Canada en Afghanistan, William Crosbie, qu'il exige des éclaircissements quant au sens à donner aux propos du chef d'État.

De passage dans la capitale afghane, Kaboul, pour annoncer l'envoi de 90 soldats canadiens supplémentaires, affectés surtout à la formation des forces de sécurité, le ministre de la Défense nationale, Peter MacKay, a lui aussi critiqué les récentes déclarations du président Karzaï, les qualifiant de «remarques irréfléchies». Avec ce nouvel ajout de troupes, le Canada comptera bientôt près de 3000 soldats en Afghanistan, pour une mission militaire qui doit prendre fin en 2011.

En novembre dernier, le ministre Cannon avait assisté, à Kaboul, à la cérémonie d'investiture du président afghan, reporté à la tête du pays après un scrutin entaché d'irrégularités, à l'été 2009. Le ministre avait alors assuré le gouvernement afghan de l'appui du Canada. Lors de son premier mandat, en septembre 2006, M. Karzaï avait été reçu avec les plus grands honneurs au parlement, à Ottawa.