Les pouvoirs des députés de la Chambre des communes ont été au coeur d'un débat entourant l'accès à des versions non censurées de documents concernant la présumée torture de détenus afghans.

Le ministre fédéral de la Justice, Rob Nicholson, est intervenu mercredi dans le débat en affirmant que les députés des Communes ne jouissent pas de l'autorité requise pour exiger un accès complet à ces documents.

Puis il a rejeté les accusations des partis de l'opposition voulant que le gouvernement ait porté atteinte à leurs privilèges parlementaires en refusant d'obtempérer à un ordre datant du 10 décembre, adopté par la Chambre des Communes, exigeant la remise des documents non censurés.

«Je rappelle à la Chambre que nos privilèges parlementaires ne sont pas indéterminés ni illimités», a lancé M. Nicholson.

«L'étendue précise de ces privilèges a fait l'objet de débats depuis la promulgation de l'Acte de l'Amérique du Nord Britannique.»

Le ministre Nicholson a fait valoir que le gouvernement avait l'obligation de garder secrètes des informations qui pourraient mettre en péril la sécurité nationale, nuire aux relations internationales du pays ou même possiblement mettre en danger la vie de soldats canadiens en Afghanistan.

Il a ajouté que la Chambre des communes ne pouvait se soustraire aux lois dans de tels cas, citant à l'appui un passage d'une décision de la Cour suprême du Canada concluant que les assemblées législatives ne sont pas des enclaves où les lois du pays ne s'appliquent pas.

M. Nicholson a également évoqué plusieurs cas, au Canada, au Royaume-Uni et en Australie, où l'obligation du gouvernement de garder secrètes certaines informations primait sur «le droit de savoir des parlementaires».

Voilà comment Rob Nicholson a rejeté les arguments présentés il y a deux semaines par les trois partis de l'opposition. Le Parti libéral, le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique avaient alors demandé au président de la Chambre des communes, Peter Milliken, de décréter que le gouvernement avait porté atteinte aux privilèges parlementaires en refusant de fournir les documents réclamés.

M. Milliken a indiqué aux députés qu'il ne tranchera pas immédiatement le différend.

Mais si jamais M. Milliken se prononçait en sa faveur, l'opposition a l'intention de présenter des motions de censure contre le gouvernement et trois de ses ministres -Rob Nicholson et ses collègues à la Défense nationale et aux Affaires étrangères, Peter MacKay et Lawrence Cannon.

En théorie, cela pourrait conduire à l'emprisonnement des ministres jusqu'à la fin de la session parlementaire.

Cependant, si une telle situation devait se produire, le gouvernement fédéral pourrait s'adresser à la justice ou forcer la tenue d'une élection sur la question.