Les Forces canadiennes ont été appelées en renfort, mercredi, pour aider les 2400 sinistrés qui habitent le long de la rivière Richelieu. Car l'eau continue de monter et de faire des ravages en Montérégie, aux prises avec les pires inondations depuis 150 ans.

Des secteurs jusqu'ici épargnés sont maintenant sous l'eau. C'est le cas de certains quartiers de Carignan et de Chambly. Tout le littoral du Richelieu compris entre le lac Champlain et Sorel est maintenant touché par les inondations. Dans la seule journée de mercredi, le nombre de municipalités touchées est passé de 10 à 15.

Une équipe de militaires était attendue mercredi soir à Saint-Jean pour «assurer la sécurité de la population et limiter les dégâts matériels», a expliqué Mathieu St-Pierre, du cabinet du ministre de la Sécurité publique.

Mercredi matin, dans les rues du quartier Saint-Eugène, les pompiers visitaient les maisons inondées. «Les sinistrés sont fatigués. Ça fait plus d'une semaine qu'ils se battent. On les visite pour être certains qu'ils ne manquent de rien», a dit le lieutenant Daniel.

Le miraculé

Yannick Napert, qui habite à quelques mètres de la rivière, est un miraculé. Dans sa rue, l'eau est si haute que même les pompiers s'y rendent en bateau. Les représentants de La Presse, qui ont enfilé de longues bottes pour l'arpenter, avaient de l'eau jusqu'à la taille.

Mais dans la maison de M. Napert, l'eau n'a pénétré nulle part. Lorsqu'il l'a construite, il y a quelques années, ce jeune père de famille a pris soin de la bâtir sur pilotis, en hauteur, et d'installer un nombre incroyable de pompes et de systèmes d'étanchéité.

«À l'époque, les gens riaient de moi et disaient que j'en faisais trop. Mais aujourd'hui, je suis content. Je mange chez moi au sec. Même mon sous-sol est complètement sec», explique-t-il.

En face de chez lui, ses beaux-parents luttent sans relâche pour repousser l'eau qui tente de s'infiltrer. Les pompes fonctionnent sans arrêt. L'eau atteint au moins 50 cm devant la porte du garage. Des sacs de sable contiennent ce mur d'eau, mais la pression est forte. «L'eau pousse en dessous de la maison et s'infiltre partout. C'est dur», a résumé M. Napert.

Juste à côté, la maison de l'arrière-grand-mère de la famille est maintenant abandonnée. La dame de 97 ans a dû partir mardi. Marcher dans cette demeure donne le frisson. L'eau est partout. Cette maison a été construite il y a plusieurs années et est plus basse. Du salon, on voit l'eau, dehors, qui arrive au milieu de la fenêtre...

Attention aux piscines!

Circuler dans les rues et sur les terrains inondés devient périlleux. Un photographe de La Presse l'a appris à ses dépens lorsque, lesté de ses appareils photo et de son attirail, il s'est enfoncé de près de 2 m dans une piscine creusée, invisible à cause de la turbidité de l'eau. Ses cuissardes se sont remplies d'eau, et l'extirper de ce bain involontaire a été ardu.

Plusieurs municipalités ont continué d'exhorter leurs citoyens à évacuer leurs maisons, notamment à Saint-Paul-de-l'Île-aux-Noix, Noyan et Henryville. Jusqu'à maintenant, environ 400 personnes y ont consenti, mais comme il y a beaucoup de va-et-vient, il est difficile d'évaluer leur nombre exact, explique le porte-parole de la Sécurité civile de la Montérégie et de l'Estrie, Éric Doneys. « De plus en plus de sinistrés sont épuisés et choisissent de partir », a-t-il ajouté.

Même les 150 élèves du Collège militaire royal, qui entrent en examen vendredi, ont été évacués vers la garnison de Saint-Jean parce que les risques d'inondation sont trop grands.

Encore en hausse

Six centres d'aide sont maintenant ouverts dans les villes riveraines du Richelieu. On s'attend à ce qu'un nombre croissant de citoyens y aient recours, car l'eau continuera de monter jusqu'à vendredi et peut-être même samedi, a expliqué M. Doneys. «L'eau va atteindre un niveau très haut samedi et va commencer à descendre lundi», a-t-il précisé.

La hausse exacte à venir est impossible à évaluer. « Le niveau est tellement haut actuellement qu'on est en terrain inconnu. On ne sait pas de combien l'eau montera encore, mais on peut facilement parler de plusieurs centimètres », a noté M. Doneys.

De plus en plus de routes inondées doivent être fermées. Hier, de grands segments de la Route 223 entre Carignan et Beloeil ont été interdits à la circulation.