Le premier ministre Jean Charest se dit prêt à réviser les règles des appels d'offres pour permettre aux villes de reprendre plus facilement le processus en cas d'irrégularités ou d'écarter certaines entreprises. C'est trop peu pour la Fédération québécoise des municipalités (FQM), qui dénonce le «bricolage législatif» et réclame plutôt une enquête publique.

La semaine dernière, la mairesse de l'arrondissement de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles, Chantal Rouleau, a demandé des changements aux règles des appels d'offres pour mettre fin à la mainmise du crime organisé sur l'industrie de la construction, une demande appuyée par le maire de Montréal, Gérald Tremblay. «Je suis très sensible à cette demande», a indiqué Jean Charest.

«La loi prévoit des marges de manoeuvre, mais dans le monde municipal, ce qu'on nous dit depuis quelques jours, c'est que les marges de manoeuvre sont trop serrées ou difficilement applicables. On va examiner la question avec le monde municipal. On ne laissera pas ça en plan, et ça mérite un examen pour qu'on puisse s'assurer que les gens du municipal ont les marges de manoeuvre suffisantes», a poursuivi le premier ministre.

L'Union des municipalités du Québec (UMQ) a d'ailleurs réitéré, mercredi, sa demande maintes fois faite au gouvernement pour obtenir de tels changements, dans une lettre envoyée au premier ministre Charest. «Quand le ministère des Affaires municipales dit qu'on peut annuler un appel d'offres et le reprendre, oui, légalement, on peut le faire. Mais on se trouve dans une zone grise parce qu'il faut avoir des motifs raisonnables», expose Érik Forest, président de l'UMQ.

La FQM juge insuffisante une nouvelle modification des règles d'appel d'offres. «Il faut arrêter le bricolage législatif. Ça fait un an et demi qu'on fait de l'adoption de lois et on voit que le problème ne se règle pas», dénonce le président de la FQM, Bernard Généreux.

Le bureau du Directeur général des élections (DGE) a quant à lui salué les témoignages des maires ayant dénoncé dans La Presse le phénomène des élections clés en main. «On trouve encourageant que des gens commencent à s'exprimer, à dire publiquement qu'ils s'étaient fait offrir des élections clés en main. Notre principal problème dans la vie, c'est justement le secret», a indiqué un porte-parole du DGE, Denis Dion.

Il reste que le DGE ne peut rien faire pour punir les entreprises qui ont offert des élections clés en main aux trois élus interrogés par La Presse. Car c'est depuis le 1er mai seulement que la Loi sur les élections dans les municipalités prévoit que le fait d'offrir une contribution illégale - comme des élections clés en main - constitue une infraction. Les offres d'élections clés en main doivent être survenues après cette date pour que le DGE sévisse. Rappelons que les maires de Brossard et de Mont-Saint-Hilaire de même qu'un ex-élu de Sainte-Marthe-sur-le-Lac ont affirmé à La Presse que des entreprises ont tenté de financer leur campagne électorale en 2005 et 2009.

«Il n'est pas exclu» que le DGE les rencontre pour savoir qui leur a offert des élections clés en main.

Avec Tommy Chouinard et Sara Champagne