Fustigée par un quatrième député démissionnaire, défiée par Bernard Drainville, Pauline Marois a dû faire son mea-culpa et battre en retraite, mardi.



«J'admets que j'ai commis une erreur au départ» en appuyant le projet de loi sur l'amphithéâtre à Québec sans avoir consulté les députés, a reconnu la chef péquiste en début d'après-midi.

Elle ouvrait ainsi la porte à un vote libre sur ce projet controversé... un vote qui n'aura finalement pas lieu. Le premier ministre Jean Charest a annoncé quelques minutes plus tard que l'adoption du projet de loi 204, qui a déchiré le PQ, était reportée à l'automne.

«C'est la première fois que ça arrive en quatre ans que nous n'avons pas de débat avant la présentation d'un projet de loi. Je ne croyais pas, honnêtement, que ça allait prendre l'ampleur que cela a prise. Il faut que je sois bien franche et, dans ce sens-là, peut-être aurais-je dû diriger le tout de façon autre», a expliqué Mme Marois au terme de la deuxième réunion des députés du PQ dans la même journée sur le projet de loi 204.

Déchirements

Le déroulement de la journée, bien qu'elle se soit terminée par le report de l'adoption de la loi, témoigne des déchirements au PQ. Lors de la première réunion des députés, au moment où la démission de Jean-Martin Aussant se confirmait, Pauline Marois a jeté un peu de lest. Elle s'est dite prête à permettre à quelques députés, six tout au plus, de s'absenter au moment du vote. Une dizaine d'absences étaient toutefois hors de question parce que ce serait perçu comme une atteinte inacceptable à son leadership, avait-elle expliqué en privé.

La proposition s'est avérée insuffisante pour plusieurs députés. La chef péquiste avait fait la même offre, en vain, aux démissionnaires Lisette Lapointe, Louise Beaudoin et Pierre Curzi, une heure avant leur conférence de presse lundi.

Fronde de Drainville

À la surprise générale, le député de Marie-Victorin, Bernard Drainville, a défié Mme Marois et exigé un vote libre sur le projet de loi 204, porté par sa collègue Agnès Maltais. Le député de Labelle, Sylvain Pagé, a lui aussi estimé que la chef devait «aller un petit peu plus loin».

Pauline Marois, qui tenait au départ à imposer la ligne de parti, a cédé lors de la deuxième rencontre des députés. Le vote libre «est une hypothèse que nous regardons actuellement», a-t-elle confirmé à sa sortie de réunion.

«On a fait le point ensemble et je crois que les gens sont rassurés. Ils auraient souhaité qu'on puisse agir autrement, ils avaient toutes sortes de points de vue, ils les ont exprimés, je les ai écoutés. Je crois qu'à partir de maintenant on devrait resserrer les rangs.»

Le député de Bertrand, Claude Cousineau, avait déjà dit qu'il ne pourrait se résoudre à voter pour le projet de loi et menaçait de claquer la porte lui aussi. «Il y a de belles portes ouvertes», comme celle du vote libre et même la possibilité d'amender le projet de loi, a-t-il affirmé après la réunion. Selon lui, «le leadership de Mme Marois est très solide».

«Il y a de belles ouvertures, a dit de son côté Sylvain Pagé. Je suis satisfait de ce que j'entends jusqu'à maintenant.»

Bernard Drainville, lui, s'est fait laconique: «Il n'est pas question que je quitte le caucus. On cherche la meilleure solution possible dans le respect de nos valeurs.» L'urgence de la question est tombée avec le report annoncé par Jean Charest.

Malgré deux réunions corsées, Pauline Marois dit avoir «un appui remarquable» des députés. «Ils sont aussi tristes que moi de ce qui s'est passé dans les derniers jours et ne souhaitent pas que ça se reproduise.»

La chef péquiste a balayé d'un revers de main les critiques de M. Aussant, qui a exigé sa démission. «Je vais faire la preuve que la souveraineté est au coeur de notre engagement et de notre action», a-t-elle répliqué. Elle présentera un «plan de match dans les prochains jours».

Le mea-culpa de Mme Marois et son ouverture au vote libre «ne changent rien» à la décision de Louise Beaudoin. «Il y a une vraie rupture», causée par bien plus que le litige sur le projet de loi 204, a expliqué la députée indépendante