Le directeur du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) s'est porté à la défense de ses policiers, mercredi, soutenant que ces derniers ont accompli un boulot exceptionnel pendant la crise étudiante du printemps 2012.

«Je ne peux pas cacher ma fierté par rapport à mes policiers, parce qu'on parle beaucoup des choses qui n'ont pas fonctionné à notre goût ou qu'on remet en question, mais ils ont fait un travail remarquable», a affirmé Marc Parent devant la Commission spéciale d'examens des événements du printemps 2012 (CSEEP).

«Moi, je n'ai pas vu ça ailleurs dans le monde», a-t-il poursuivi, soutenant que les pratiques mises à profit par le SPVM pendant cette période mouvementée sont devenues des «références» à l'échelle planétaire.

Le chef de police a fait valoir que le contexte inédit, l'ampleur insoupçonnée et la durée imprévisible du soulèvement étudiant ont en outre forcé le SPVM à adapter ses pratiques, puisque les tactiques conventionnelles ne donnaient plus les résultats escomptés.

Le SPVM a ainsi appliqué les principes directeurs ayant pris racine au cours de la gestion du mouvement Occupons Montréal (à l'automne 2011), dont le recours à des agents médiateurs, a exposé le directeur du corps policier montréalais.

Malgré tout, les stratégies ont constamment dû être révisées, a expliqué Marc Parent aux commissaires Serge Ménard, Claudette Carbonneau et Bernard Grenier.

«Il ne faut pas oublier que certains groupes perturbateurs ont même déployé des experts qui observaient en retrait les méthodes et les opérations policières pour développer des contre-mesures lors de perturbations», a-t-il déclaré.

Le président de la CSEEP, Serge Ménard, s'est intéressé à certaines des tactiques employées par le SPVM lors de manifestations déclarées illégales, notamment celle de la souricière («kettling»), mise à profit une douzaine de fois.

Ces 12 arrestations de masse ont mené à 2255 arrestations, selon les informations fournies lundi par la CSEEP.

Nombreuses sont les personnes appréhendées qui ont contesté les contraventions leur ayant été collées lors de ces interventions - certains soutiennent qu'ils étaient tout simplement au mauvais endroit, au mauvais moment, tandis que d'autres arguent qu'ils ignoraient que la manifestation avait été déclarée illégale.

Questionné sur ce type d'intervention, M. Parent a d'abord fourni au président des réponses plutôt évasives, faisant valoir que des recours collectifs avaient été déposés et que la justice devait suivre son cours, mais M. Ménard s'est montré insistant.

«Reconnaissez-vous, au fond, M. Parent, qu'il peut très bien y avoir des gens qui sont venus dans ces manifestations, qui s'aperçoivent que des manifestations sont illégales, mais qu'elles sont tolérées (...) et qui n'entendent pas le camion-flûte, qui peuvent se retrouver parmi les gens que vous arrêtez de façon massive?», a demandé le commissaire.

«Ça peut arriver», a rétorqué le chef de police.

«Mais lorsqu'on est dans une foule et qu'il se met à y avoir de l'agitation (...), à un moment donné, c'est clair qu'un citoyen qui a un jugement normal va être en mesure de pouvoir évaluer qu'il est en train de se passer quelque chose», a-t-il cependant tenu à spécifier.

La fébrilité qui régnait dans l'air de Montréal lorsque les manifestants investissaient les rues ne s'inscrivait d'ailleurs pas dans la tradition plutôt bon enfant de la métropole à ce chapitre, a suggéré le directeur du SPVM.

Il y a ainsi eu, selon Marc Parent, un «avant-2012» et un «après-2012». Car de façon générale, avant que n'éclate la crise étudiante, policiers et manifestants travaillaient dans un esprit de collaboration, a-t-il dit.

«Cela a changé au printemps 2012, a-t-il exposé. En effet, certains participants ont changé la donne pour causer le plus d'inconvénients possibles.»

Bien entendu, le climat de confrontation a mené à l'effritement du lien de confiance entre la population et les policiers, a reconnu Marc Parent.

Mais depuis, la situation est revenue à la normale: un sondage réalisé en mai et en juin 2013 dans six postes de quartier «semblait indiquer que la confiance des résidants envers la police se situe à 88 pour cent, soit le même niveau que 2011», a-t-il déclaré aux commissaires.

Il y a tout de même eu certains dérapages de la part des policiers, a-t-il néanmoins admis, notamment le fait que certains policiers ont pu proférer des propos orduriers lors de certaines interventions qui ont été filmées et publiées sur Internet ou avoir recours à une force excessive.

La question du profilage social a été éludée par les commissaires, au lendemain du dépôt d'une plainte de la Ligue des droits et libertés auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

À l'issue de son témoignage, lors d'une mêlée de presse, Marc Parent a assuré que cette pratique était «inadmissible dans (les) rangs du SPVM».

«Est-ce qu'il peut y en avoir eu au cours des dernières années, la réponse c'est oui, il peut y avoir eu des gestes isolés. Mais lorsqu'on en est témoins, on intervient», a-t-il toutefois ajouté.

Les audiences de la CSEEP se poursuivent jeudi. On s'attend à ce que le dirigeant de la Sûreté du Québec, Mario Laprise, se présente devant les commissaires.