La Coalition avenir Québec (CAQ) a proposé hier d'augmenter les droits de scolarité de 200$ par année pendant cinq ans. Une solution que son chef, François Legault, présente comme un «compromis» pour dénouer le conflit étudiant, mais qui a été accueillie par un concert de dénonciations dans les milieux étudiant et politique.

Sur le campus de l'Université de Montréal, le chef caquiste a présenté huit candidats issus du milieu de l'éducation. Il en a profité pour dévoiler ses propositions pour mettre fin au bras de fer qui oppose Québec aux associations étudiantes depuis l'hiver.

La hausse serait moins élevée que celle décrétée par le gouvernement libéral - qui est de 254$ par année pendant sept ans. Elle ne s'appliquerait qu'à partir de janvier 2013, plutôt que cet automne. Après cinq ans, le coût des études continuerait d'augmenter en fonction de l'inflation.

«La majorité des Québécois reconnaissent que, devant le financement de nos universités, c'est nécessaire de hausser les droits de scolarité, a affirmé François Legault. Ce n'est pas responsable de dire qu'il faut les geler ou simplement désinvestir.»

Après cinq ans, donc, les droits de scolarité seraient plus élevés de 1000$ par année sous un gouvernement caquiste. Ils grimperaient de 1778$ au bout de sept ans avec un gouvernement libéral.

Selon le scénario envisagé par la CAQ, une partie de la hausse serait remplacée par une diminution du crédit d'impôt pour les études universitaires.

M. Legault accuse le gouvernement Charest d'avoir sciemment entretenu le conflit étudiant afin de détourner l'attention des allégations de corruption qui pèsent sur lui. Il a bon espoir que ses propositions trouvent une oreille attentive chez les associations étudiantes modérées, soit la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) et la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ).

En revanche, il n'exclut pas d'aller de l'avant sans l'aval de la CLASSE, qui prône la gratuité scolaire.

«Je pense que ça va être plus difficile avec la CLASSE. On se le dit parce que la CLASSE a fait un manifeste où elle demande la gratuité scolaire», a reconnu M. Legault.

Celui-ci a appelé les étudiants à rentrer en classe à la mi-août, comme prévu. Il a aussi demandé au gouvernement Charest de suspendre les articles de la loi spéciale qui touchent le droit de manifester.

Les étudiants ripostent

Les associations étudiantes ont toutefois rejeté en bloc les avances du chef caquiste. La hausse, même plus modeste, reste «très insatisfaisante» aux yeux de Martine Desjardins, présidente de la FEUQ. Elle s'explique mal le changement de cap de la CAQ, qui a appuyé le gouvernement Charest dans les premières semaines du conflit et qui a voté en faveur de la loi spéciale (78).

«M. Legault est un peu une girouette», a affirmé Mme Desjardins.

«Une hausse des droits de scolarité, même si elle est de 200$, va diminuer l'accès aux études et, en fin de compte, on va se retrouver avec moins d'étudiants sur les bancs universitaires et des étudiants plus endettés», a ajouté Éliane Laberge, présidente de la FECQ.

La CLASSE estime pour sa part qu'il serait «prétentieux» pour un éventuel gouvernement caquiste d'exclure ses représentants de la table des négociations, puisque ses membres constituent 70% des étudiants en grève.

«Notre objectif pour cette année, c'est de bloquer la hausse totalement, a dit Camille Robert, co-porte-parole de la CLASSE. Ce n'est pas de se retrouver avec une hausse de 200$ ou de 100$. C'est de ne pas avoir de hausse du tout.»

«Opportunisme»

Les adversaires politiques de

M. Legault ont eux aussi dénoncé en choeur la proposition d'hier.

En abolissant une partie du crédit d'impôt, Jean Charest affirme que la facture des étudiants sera plus élevée. «M. Legault aurait intérêt à compter. Ce n'est pas un changement qu'il propose, mais quelque chose qui va coûter plus cher aux étudiants. Il aurait intérêt à passer un peu moins de temps sur Twitter et un peu plus de temps avec sa calculatrice», a-t-il dit.

Aux yeux du Parti québécois, la nouvelle prise de position de

M. Legault témoigne de son «incohérence». «C'est une démonstration hors de tout doute que la CAQ n'est pas prête à former le gouvernement», dénonce Sylvain Gaudreault, député de Jonquière.

- Avec la collaboration d'Émilie Bilodeau

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Les propositions des partis



PLQ

> Hausse des droits de scolarité de 254$ par année pendant sept ans

> Entrée en vigueur de la hausse dès l'automne

> Maintien de la loi spéciale (78)

PQ

> Gel des droits de scolarité jusqu'à la

tenue d'un sommet

sur l'éducation

> Advenant une hausse, celle-ci sera indexée au coût de la vie

> Abolition de la loi spéciale

CAQ

> Hausse des droits de scolarité de 200$ par année pendant cinq ans

> Abolition partielle du crédit d'impôt pour les études supérieures

> Suspension des articles de la loi spéciale qui limitent le droit de manifester

QS

> Gratuité scolaire: élimination de tous les frais facturés aux étudiants

> Bonification du système d'aide financière aux études

> Suppression de la loi spéciale

- Martin Croteau