Des manifestations ont perturbé la soirée de festivités du Grand Prix vendredi à Montréal, après les accrochages qui ont eu lieu jeudi à l'ouverture de l'événement.

Même s'il y a eu peu de grabuge et de vandalisme, la soirée de manifestations de vendredi fut un vrai charivari au cours duquel policiers et militants se sont mutuellement pourchassés, se lançant cailloux contre balles de caoutchouc et gaz irritant. Le tout au milieu des fêtards, demoiselles en petite tenue faisant la promotion de babioles diverses et touristes de la rue Crescent éberlués par cette vie nocturne devenue l'ordinaire des Montréalais.

La veille, le groupe d'intervention du SPVM avait usé de tous les moyens - gaz irritants, matraques et bombes assourdissantes - pour empêcher des manifestations de s'approcher des rues Peel et Crescent, haut lieu des festivités du Grand Prix.

Ce vendredi, les manifestants sont arrivés par petits groupes, discrètement.

Vers 21h, c'était l'évidence: il y avait plus de 200 carrés rouges, quelques-uns masqués, à l'angle Crescent et Maisonneuve.

Rapidement, les policiers ont mis leurs casques et empoigné leurs matraques pour former un cordon bloquant l'accès au site, tant du côté nord que du côté sud du boulevard De Maisonneuve. Derrière les policiers, une rangée d'agents de sécurité musclés et, derrière eux, les fêtards du Grand Prix.

Cette occupation pacifique a donné lieu à des scènes surréelles.

Des manifestants échangeaient des doigts d'honneur avec des clients de la terrasse di Pino Lounge, derrière les policiers. Au sud de De Maisonneuve, des chanteurs se produisaient sur la scène. Les pauvres se faisaient voler la vedette par les manifestants, qui étaient le centre d'attraction des fêtards. Les artistes se sont même fait huer. Et pris dans ce brouhaha, un jeune homme portant sur son dos une grande pancarte faisant la promotion d'un festival de musique à Ottawa pour la fête du Canada... un chien dans un jeu de quilles. «Mais personne ne me dérange trop», a-t-il affirmé.

Pour une raison obscure, le cordon de policiers du côté nord de De Maisonneuve a libéré l'accès, et le groupe de carrés rouge a investi la portion de Crescent entre cette rue et la rue Sherbrooke.

Ce qui a donné lieu à tout un clash.

Ainsi, des manifestants anticapitalistes défilaient à travers des Maserati, Dodge Viper et autres voitures musclées, et devant des jeunes femmes très légèrement vêtues faisant la promotion de jantes de voitures ou de lunettes.

«Libérez les pitounes!», ou «Anti, antisexiste!», scandait la foule.

«Je ne trouve pas le Grand Prix sexiste, et ils nuisent plus que d'autre chose. Ici, il y a des gens de tous les genres», a expliqué une des jeunes femmes visées.

Une échauffourée a éclaté entre jeunes fêtards et une manifestante, accusée par l'un deux de lui avoir craché au visage. Les esprits se sont échauffés, ça sentait la bagarre, mais tout est rentré dans l'ordre.

Puis, le groupe s'est dispersé pour se joindre à la manifestation nocturne partie plus tôt du parc Émilie-Gamelin, après avoir encore une fois été déclarée illégale par le SPVM, et qui comptait environ 400 participants. En empruntant un parc, ils ont réussi à se faufiler dans le périmètre que tentaient de leur interdire les policiers et à se mêler à la foule.

«Enlève ton carré rouge pour passer inaperçu», a dit un manifestant à un ami alors qu'ils tentaient de gagner à leur tour la rue Crescent.

À parti de ce moment, la soirée a été un jeu de chat et de la souris qui a duré plus de deux heures avec les policiers. Rapidement scindés en quelques petits groupes, les manifestants ont tantôt été pourchassés par les policiers du groupe d'intervention, et les ont parfois poursuivis à leur tour.

Angle Peel et Sainte-Catherine, des manifestants ont lancé des cailloux vers les policiers. Un des lanceurs présumés s'est fait lancer une balle de caoutchouc derrière la jambe, ce qui l'a neutralisé pour un moment. Les balles utilisées par le SPVM ne sont pas celles, vertes et en plastique dur, qui ont servi à la SQ à Victoriaville. Il s'agit d'une balle de styromousse assez ferme, placée au bout d'un petit cylindre de plastique léger.  

Sur d'autres fronts, des gaz irritants ont été utilisés.

Sur la rue Bishop, où les policiers étaient à ce moment absents, une violente bagarre a éclaté entre un manifestant et un touriste anglophone ivre. De violents coups de poings et de pieds ont fait mouche de part et d'autre. Mais le touriste a eu un malaise et perdu la lutte. Tout près, des graffitis ont été faits sur une Mercedes.

Angle Crescent et Saint-Catherine, les hommes du groupe d'intervention se sont amenés plusieurs fois à la course en tapant sur leur bouclier pour faire dégager les manifestants. Ce qui a terrorisé certaines personnes simplement venues faire la fête dans le cadre du Grand Prix.

«Moi, je décalice. Ça pas d'allure», a lancé une dame dans la cinquantaine à son accompagnateur.

Vers minuit 30, le centre-ville était redevenu calme.

Une douzaine d'arrestations, pour «différents actes criminels» et entraves à des règlements municipaux, ont été rapportées par le SPVM.