Malgré les critiques, la police de Montréal juge légitime d'avoir procédé à une des plus grosses arrestations de masse de son histoire dans la nuit de mercredi à jeudi. Et elle prévient les manifestants: d'autres souricières pourraient être mises en place s'ils refusent encore de divulguer leur itinéraire à l'avance.

«Les gens peuvent être arrêtés s'ils ne donnent pas le chemin à l'avance, ils savent qu'ils s'exposent à ça», a martelé jeudi le commandant Ian Lafrenière, porte-parole du SPVM, lorsque questionné sur une répétition du scénario lors des prochaines manifestations.

Rappelons que 518 personnes ont été arrêtées dans le cadre de la manifestation nocturne, dont un groupe de 506 qui ont été encerclés d'un seul coup à l'angle des rues Sherbrooke et Saint-Denis. Possiblement un record pour Montréal, concède le SPVM, qui ne tient toutefois pas de palmarès officiel.

La marche avait été déclarée illégale dès son départ en vertu du nouveau règlement municipal obligeant la divulgation de l'itinéraire et interdisant le port du masque. Les gens piégés dans la souricière ont reçu un constat d'infraction assorti d'une amende de 634$.

Plusieurs arrêtés ont déploré cette approche. Selon eux, rien ne justifiait une telle réponse.

«L'attitude de la police est ambiguë. Ils disent au début que la manif est illégale, mais qu'ils vont la tolérer si elle est pacifique. Je n'ai rien vu venir, jusqu'à ce que je me retourne et que je voie des policiers partout. Pourtant, tout le monde trouvait que c'était une des soirées les plus pacifiques», raconte Mathieu Meunier, un étudiant en psychologie habitué des marches nocturnes.

«J'ai vu des choses que je n'ai pas aimées. Je crois qu'ils ont chargé alors que ce n'était pas nécessaire, et il y avait des policiers à vélo qui se garrochaient sur le monde pour les frapper», affirme Yves Manseau, qui jure n'avoir vu aucun acte d'agression contre la police justifiant de mettre fin au rassemblement.

Le SPVM rétorque que des roches et même un objet en feu ont été lancés à des policiers. Une agente a d'ailleurs été blessée par un projectile.

«On garde la même ligne de conduite depuis le début. On demande aux gens de circuler dans le sens de la circulation et on ne tolère pas les actes criminels. Après 30 manifestations de nuit, dont plusieurs ont été tolérées même si elles ne donnaient pas leur itinéraire, les gens ont certainement compris comment ça marche», affirme Ian Lafrenière.

Le maire Gérald Tremblay affirme que c'est la police qui applique le nouveau règlement selon son jugement. Les élus n'ont donné aucune instruction spécifique en ce sens. Il estime que «la minorité qui s'exprime» a des droits, mais que les policiers doivent aussi «protéger la majorité» qui ne manifeste pas.

«Les policiers ont un règlement et ils demandent l'itinéraire. S'il n'y a pas d'itinéraire et qu'on paralyse les rues et qu'il n'y a plus de circulation...est-ce qu'on va attendre un événement tragique ? Est-ce qu'on va attendre qu'un automobiliste perde pateience et que quelqu'un décède?» a-t-il demandé.

Appelé à commenter les 500 arrestations de Montréal et les 200 qui ont eu lieu en parallèle à Québec, le ministre de la Sécurité publique Robert Dutil a insisté sur la nécessité de l'intervention de la police.

«On n'aime jamais voir des manifestations avec de la violence, du tintamarre, je ne suis pas content de voir ces images qu'on voit dans d'autres pays», a-t-il déclaré.

- Avec la collaboration de Denis Lessard