Les étudiants et élèves en grèvent doivent-ils être forcés de respecter les injonctions décrétées par les tribunaux qui ordonnent la reprise des cours? Ni le gouvernement, ni l'opposition péquiste, ni même l'Assemblée nationale n'ont adopté une position catégorique à ce sujet.

Le gouvernement Charest a soufflé le chaud et le froid, hier, sur le respect de ces injonctions qui forcent la reprise des cours dans plusieurs établissements d'enseignement au Québec. Tandis que le ministre responsable de la police, Robert Dutil, menaçait d'en forcer l'application, son collègue à la Justice, Jean-Marc Fournier, se faisait bien plus conciliant.

Dans plusieurs établissements, les étudiants et élèves en grève ont encore défié la décision du tribunal, hier. Cégeps et universités se retrouvent coincés entre l'obligation de donner les cours et celle d'assurer la sécurité sur les campus.

«Il y a eu des injonctions, le droit à l'éducation est reconnu, les gens qui les ont demandées veulent étudier. Ces injonctions devraient être respectées. Il y a des gens dans la société qui ont décidé de ne pas respecter les injonctions, c'est un problème nouveau et grave», a déclaré le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil. «Avez-vous déjà vu des groupes qui disent que la désobéissance civile fait partie des droits fondamentaux?», a-t-il renchéri, en soulignant que le gouvernement «aurait à regarder la question».

Plus conciliant, le ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier, a dit de son côté: «Il faut demander aux gens qui portent le carré rouge de cesser d'avoir ce comportement. Depuis le début, le gouvernement a été attentif, dans le respect de tous les jeunes. Carré rouge ou vert, ce sont tous nos jeunes, quelle que soit la couleur du carré. Le gouvernement doit mesurer les gestes qu'il fait.» Il a conclu qu'«en même temps, il faut affirmer que ceux qui veulent assister à leurs cours n'ont pas de raison de ne pas y assister».

Réactions de l'opposition

Selon la chef du Parti québécois, Pauline Marois, les injonctions ne font que «provoquer davantage» les étudiants et élèves qui appuient la grève et envenimer le climat sur les campus. Elle a tergiversé au sujet du respect de ces décisions de tribunaux. «On peut bien mettre des injonctions, mais il y a des étudiants qui se sont prononcés démocratiquement pour une grève. On peut ajouter les injonctions, et je crois que la justice doit être respectée au Québec, mais ce n'est pas la voie qui doit être privilégiée. Ce n'est pas la voie à suivre lorsqu'on est dans un conflit d'une telle importance et qui met en cause une position qui n'est pas acceptable de la part du gouvernement», dit-elle.

À l'Assemblée nationale, le porte-parole de la Coalition avenir Québec en matière d'éducation, Éric Caire, a tenté en vain de déposer une motion pour que le gouvernement impose le respect des injonctions. «Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement qu'il fasse respecter les injonctions des tribunaux visant à permettre aux étudiants qui le demandent de poursuivre leurs cours», précise la motion. Amir Khadir, député de Québec solidaire, a refusé spontanément son consentement, sans qu'on sache quel sort lui auraient réservé les libéraux et les péquistes.

«Si notre motion n'avait pas été bloquée, la population aurait pu entendre le Parti québécois et le gouvernement libéral sur le respect des injonctions et juger de leur volonté réelle à faire respecter les ordres des tribunaux. Les Québécois savent où loge la Coalition. Ce qu'ils ne savent pas, c'est où logent le Parti québécois et le Parti libéral», a lancé M. Caire. Selon lui, «le silence actuel du gouvernement est dangereux, car il laisse entendre qu'il est acceptable de défier la loi et les injonctions émises par les tribunaux».