« Personne ne mettait en doute l'intégrité du Dr Arthur Porter » au moment où il magouillait pour effectuer une fraude historique de 22,5 millions pour la construction du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), a déclaré l'homme qui présidait, à l'époque, l'Agence des partenariats publics-privés (PPP).

«Je sais bien qu'aujourd'hui, lorsqu'on regarde le film par la fin on se dit voyons donc! Moi aussi j'aurais dû allumer», a déclaré Normand Bergeron devant la commission Charbonneau cet après-midi.

L'Agence des PPP était le représentant du gouvernement du Québec dans le processus de préparation des propositions des deux consortiums soumissionnaires dans le projet du nouveau CUSM, soit SNC-Lavalin et le géant espagnol OHL.

Selon l'enquête menée par la commission, le Dr Arthur Porter, qui était directeur général du CUSM à l'époque, a tenté par plusieurs moyens de faire en sorte que le consortium dirigé par SNC-Lavalin remporte le contrat.

«Vous ne trouviez pas qu'il y avait un eu trop de pression de M. Porter ? Qu'on voyait son jupon dépasser, a demandé la juge France Charbonneau.

« C'est sûr qu'on avait devant nous quelqu'un qui était le président de la commission de la sécurité du Canada, qui était un éminent oncologue et qu'on me décrivait comme le meilleur gestionnaire des hôpitaux du Québec », a répondu Bergeron. «Quand j'ai pris le travail, on m'a dit que si le CHUM va mal, c'est parce qu'il n'y a pas un Arthur Porter! »

Normand a aussi tenté de minimiser son implication dans le dossier du CUSM. «On m'a toujours dit que les PPP c'était anti-collusion. Je n'étais pas quelqu'un qui était sur le terrain, je travaillais une journée par semaine sur ce dossier-là. »

La commission entend maintenant Gabriel Soudry, représentant de l'Agence des PPP dans le dossier CUSM. Il poursuivra son témoignage demain matin.

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Normand Bergeron

Photothèque Le Soleil

Arthur Porter

« La plus grande fraude de corruption de l'histoire du Canada »

Avant d'entendre Bergeron et Soudry, la commission s'est attaquée au volet financier de la fraude entourant l'octroi du contrat du super-hôpital du CUSM.

Le sergent-enquêteur de l'escouade Marteau, Jean-Frédérick Gagnon est venu exposer la « route de l'argent » passé des mains du corrupteur, SNC-Lavalin, à celles des corrompus : le Dr Arthur Porter et les frères Yanaï et Yoann ElBaz.

L'enquête sur le CUSM visait «la plus grande fraude de corruption de l'histoire du Canada, au pro rata de la valeur du contrat», a lancé Gagnon, d'entrée de jeu.

La fraude de 22,5 millions au CUSM a fait couler beaucoup d'encre au cours des deux dernières années. Gagnon a confirmé que grâce à la mise sur pied de sociétés-écrans, l'ancien directeur-général du CUSM, Dr Arthur Porter et sa femme Pamela, ont «eu le contrôle» de 11,25 millions $. L'ancien directeur-adjoint de l'hôpital Yanaï Elbaz et son frère, l'avocat Yoann Elbaz, ont mis la main sur l'autre moitié du pot-de-vin.

C'est l'ancien PDG de SNC-Lavallin Pierre Duhaime et son vice-président, Riadh Ben Aïssa, qui ont demandé le transfert d'argent à Sierra Asset Management, la compagnie coquille du Dr Arthur Porter enregistrée aux Bahamas. Sur papier, ils ont fait passer les pots-de-vin comme des versements à un lobbyiste étranger pour l'obtention d'un contrat gazier en Algérie que SNC-Lavalin avait déjà remporté en juin 2009.

Les contrats signés entre SNC-Lavalin et Sierra Asset Management sur lesquels l'escouade Marteau a mis la main prévoyaient trois versements de 10 millions. Les policiers ont retracé le versement de 22,5 millions à Sierra Asset Management. L'histoire ne dit pas ce qui est arrivé au reste de l'argent.

Sierra Asset Management a ensuite redirigé la moitié du 22,5 millions dans le compte de Pan Global Holdings, l'entreprise des frères Elbaz, ainsi que 9,9 millions de dollars dans le compte de Regent Hamilton Lumley Associates, détenu par Pamela Porter.

Les autorités soupçonnent le Dr Porter et Yanaï Elbaz d'avoir magouillé pour que le consortium dirigé par SNC-Lavalin remporte le contrat de 1,3 milliard de construction du méga-hôpital.

Huit personnes sont présentement accusées de fraude, complot, abus de confiance et commissions secrètes et recyclage des produits de la criminalité dans cette affaire, mais aucun procès n'a eu lieu pour l'instant.

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Jean-Frédérick Gagnon