Yvon Bolduc doit démissionner de son poste de patron du Fonds de solidarité de la FTQ. Sinon, la première ministre Pauline Marois doit le pousser à la porte, demande la Coalition avenir Québec (CAQ).

«Quand Mme Marois va demander son remplacement?», s'est impatienté le chef caquiste François Legault peu avant le début du caucus de présession de son parti à Saint-Eustache.

À la commission Charbonneau, l'écoute électronique a permis d'entendre une conversation entre M. Bolduc et Michel Arsenault, l'ancien président de la FTQ et du CA du Fonds de solidarité. M. Bolduc s'inquiétait que le Fonds ait pu payer la moitié des travaux sur le Touch, le yacht de Tony Accurso. «Et dans la phrase suivante, il s'est dépêché de dire: il ne faut pas que ça se sache!», a dénoncé M. Legault.

«Donc M. Bolduc était prêt à cacher une fraude», a-t-il accusé.

Dans la même conversation, Michel Arsenault avait assuré ceci au sujet du Touch: «Ça sortira pas parce que c'est pas vrai».

La décision de congédier M. Bolduc revient au conseil d'administration du Fonds de solidarité. Mme Marois pourrait toutefois leur mettre de la pression en lui retirant sa confiance, dit la CAQ.

M. Legault demande aussi que le conseil du Fonds ne soit plus présidé par le patron de la FTQ, et que la majorité de ses membres ne viennent plus du syndicat. Le gouvernement péquiste refuse de le faire.

Un «deal» injuste 

La CAQ demande aussi qu'on examine le «deal» entre le Fonds de solidarité et la fiducie immobilière Capital BLF, qui appartenait à Claude Blanchet, conjoint de Mme Marois. «Le vérificateur général pourrait faire ce travail», dit le chef Legault. 

La CAQ n'exclut même pas qu'il puisse s'agir d'un acte criminel. «Il y a des questions troublantes sans réponse, c'est à qu'on est en ce moment, et ça mérite des réponses plus complètes que celles qu'on a entendues de Mme Marois», a lancé M. Legault.

La société BLF a été créée en 2008. Elle ne possédait que deux immeubles locatifs à Montréal, sur la rue Ridgewood. Mais un an plus tard, le Fonds de solidarité investissait près de trois millions dans la fiducie. En fait, il investissait quelques sous de moins que trois millions, ce qui lui permettait d'éviter une série de contrôles serrés.

Et le Fonds a payé cher: 29 cents par actions. Deux années plus tard, le Fonds vendait une partie de ces actions à la moitié de ce prix. Si le Fonds vendait le reste aujourd'hui, ses déposants auraient perdu 1,5 million dans cette aventure.

La CAQ se demande pourquoi le Fonds a investi dans cette jeune fiducie. Il s'agit d'un placement irrégulier, le seul de son histoire en valeurs mobilières. Et il a été déficitaire. «Les 600 000 (déposants du Fonds) se sont fait avoir», dénonce M. Legault.

Pendant ces années, M. Blanchet a récolté 694 000 dollars en honoraires de gestion, dénonce la CAQ. BLF était une fiducie familiale, une structure qui lui permettait légalement de payer moins d'impôts.

Selon M. Legault, cette entente semble non seulement mauvaise et irrégulière, mais il craint que la FTQ ait ainsi essayé d'acheter une influence auprès de Pauline Marois. L'écoute électronique a révélé que M. Arsenault croyait avoir un «deal» avec M. Blanchet, qui pourrait l'aider à influencer sa conjointe, alors chef de l'opposition officielle. Cette conversation se déroulait le 17 février 2009, la journée même où M. Arsenault a dîné avec Mme Marois au club 357C, a rappelé le chef caquiste. «Elle ne doit pas nous prendre pour des valises», lance-t-il.  

Le syndicaliste espérait convaincre le PQ de ne pas réclamer de commission d'enquête publique sur l'industrie de la construction. Le PQ a finalement attendu six mois avant de se rallier à cette demande de l'Action démocratique du Québec (ADQ).

Grâce à l'écoute électronique, on a entendu Michel Arsenault avancer qu'il n'aurait «pas de trouble avec (Mme Marois)» à cause du «deal» avec BLF. À la Commission, il a qualifié cet échange de «farce plate».

«C'est facile de dire: j'ai donné telle réponse, mais c'est une blague. Mes enfants me disaient ça...», a réagi Jacques Duchesneau. Le caquiste ne veut pas dire s'il quittera la CAQ lors des prochaines élections.

M. Duchesneau déplore qu'on parle peu d'une autre catégorie de victimes. «On a évacué ceux qui n'ont jamais eu de contrat parce qu'ils se sont fait tasser.»