L'ancien président de la FTQ, Michel Arsenault, s'est senti « violé » lorsqu'il a appris que sa ligne téléphonique avait été placée sous écoute. Il affirme l'avoir appris de la bouche de policiers de l'escouade Marteau, qui enquêtaient pour déterminer si son ami l'entrepreneur Tony Accurso avait payé pour des rénovations à son domicile. Une allégation que Michel Arsenault a niée avec véhémence, aujourd'hui, devant la commission Charbonneau.

« Je me suis senti violé, surtout quand j'ai appris qu'on me soupçonnait d'être un sympathisant des Hells et qu'un juge a émis une ordonnance d'écoute », a-t-il déclaré alors qu'il était contre-interrogé par l'avocate du PQ, Me Estelle Tremblay.

Arsenault affirme qu'il a appris qu'il était sous écoute lorsque des enquêteurs sont venus le rencontrer à son bureau le 26 mai 2009 pour l'interroger. Ils ont alors fait jouer des extraits des conversations captées à son insu.

Caisse de dépôt

On apprenait hier que l'ancien premier ministre du Québec, Jean Charest, avait l'intention en 2009 de nommer Michel Arsenault comme dirigeant à la Caisse de dépôt.

Or, il n'a jamais été nominé dans ce poste. Après avoir appris la nouvelle de Henri-Paul Rousseau, ancien PDG de la Caisse, il en a discuté avec le ministre libéral Raymond Bachand.

« Bachand m'a dit que je ne serais pas nommé et moi je lui ai dit: 'est-ce que c'est à cause des écoutes et il n'a pas dit un mot'», a relaté Arsenault dans son contre-interrogatoire. « Je savais bien qu'en étant sous écoute, je ne serais jamais nommé-là, voyons donc! »

« Donc c'est arrivé après que vous avez été approché par la SQ? », a demandé Me Tremblay. « Oui », a répondu Arsenault.

«Accurso n'a pas payé mes rénovations »

Michel Arsenault a nié avec véhémence, aujourd'hui, la thèse de la procureure de la commission Charbonneau selon laquelle il avait l'intention de faire payer les rénovations de sa maison par son ami l'entrepreneur Tony Accurso jusqu'au jour où les médias ont commencé à s'intéresser à son voyage sur le Touch.

Me Sonia Lebel a diffusé, ce matin, une conversation d'écoute électronique du 19 février 2009 dans laquelle les deux hommes parlent des enquêtes journalistiques en cours de différents médias qui portent sur le séjour d'Arsenault sur le yacht aux frais de l'entrepreneur.

« Faut être prudents », lui dit Michel Arsenault. « Heille à quelle compagnie je fais le chèque? Vendredi je vais t'amener un chèque pour l'avance sur mes rénovations », ajoute-t-il.

« Attends que ce soit fini », lui répond alors Accurso.

«J'aime mieux faire une avance dans les circonstances », dit Arsenault, qui fera un chèque de 10 000$ au nom de Construction Louisbourg, l'une des nombreuses entreprises d'Accurso à l'époque.

Après la diffusion de cette écoute, la procureure a lu une transcription d'une conversation survenue entre Michel Arsenault et sa femme quatre jours plus tard, le 23 février 2009.

« Le gars il m'a dit: «ça fait 2-3 fois dans ma vie que je fais un plancher de même, ils sont très dispendieux». Je ne sais pas combien ça doit coûter cet osti de plancher-là », lui relate sa femme au téléphone. « En tout cas, on verra bien, c'est Tony qui nous a dit de prendre ça. Ben coudonc, il paiera c'est tout », ajoute-t-elle.

« Non, non, non. On payera, OK », lui répond alors Michel Arseanault.

« Hein? On payera? », réplique-t-elle.

Pourquoi semblait-elle surprise que vous alliez payer le plancher, a demandé la juge Charbonneau au témoin après la lecture de la conversation.

« Elle n'était pas surprise, elle n'était pas d'accord avec le choix des matériaux qu'elle trouvait trop dispendieux », a répondu Arsenault.

Selon Arsenault, Tony Accurso peut être « contrôlant ». Étant millionnaire, il n'avait pas la même conception de l'argent que lui.

Le couple a finalement dû prendre une hypothèque pour payer les travaux, qui se sont élevés à 97 000$. Michel Arsenault a aussi fait faire un rapport par un évaluateur pour prouver qu'il avait payé toutes ses factures. Arsenault finira par rompre son contrat avec Accurso et récupérer son chèque.

« On a payé 100% des rénos dans notre maison en 2009 », a martelé Arsenault à plusieurs reprises ce matin à la commission.

« Je vous suggère que l'unique raison pour laquelle vous avez payé vos rénovations et fait virer ce train de bord, c'est parce que l'histoire du bateau allait sortir et que vous saviez que c'était inapproprié pour vous de recevoir des cadeaux », lui a dit Me Sonia Lebel.

Un cadeau généreux

La commission a aussi révélé que Tony Accurso avait offert à l'épouse de M. Arsenault, des boucles d'oreilles 4,6 carats serties de diamants valant 12 500 $ dans un échange de cadeaux.

« La valeur était exagérée », a admis Arsenault qui, de son côté, a donné un tire-bouchon à 600$ à Accurso pour le remercier de son voyage sur le Touch.

Le couple a fini par rendre le bijou.

Écoute impliquant le ministre Tomassi

Une conversation avec l'ancien ministre libéral Tony Tomassi survenue en février 2009 a par ailleurs été diffusée aujourd'hui. Il y demande à Michel Arsenault si le Fonds de solidarité pourrait investir dans l'entreprise d'un certain Pierre de Castries.

« Tony, le nouveau ministre de la Famille, me demande ça comme une faveur, tu sais comment ils sont, et moi j'ai souvent besoin de lui », dira Michel Arsenault dans une autre écoute à un employé du Fonds.

Le témoignage de Michel Arsenault s'est terminé aujourd'hui. La commission reprendra ses travaux le 10 février.