De 200 à 300 membres de la FTQ-Construction ont donné un coup de pouce au Parti québécois lors de l'élection provinciale de mars 2007, a affirmé devant la commission Charbonneau l'ex-directeur général du syndicat, Jocelyn Dupuis.

L'avocat du Parti libéral du Québec, Me Michel Décary, a profité de son contre-interrogatoire pour questionner Jocelyn Dupuis sur un passage de son livre, Syndicalistes ou voyous. Le témoin a réitéré avoir rencontré l'ex-chef du PQ, André Boisclair, peu avant le scrutin de mars 2007.

C'est lors de cette rencontre, à l'hôtel Intercontinental, en compagnie de l'entrepreneur Paul Sauvé, que Dupuis dit avoir proposé l'aide de son syndicat au parti souverainiste. «On avait des travailleurs qui croyaient en la nationalité [souveraineté], dont moi», a-t-il expliqué.

Les syndiqués ont notamment érigé des pancartes électorales, effectué des appels téléphoniques, transporté des électeurs jusqu'aux lieux de votation et gardé des enfants pendant que leurs parents allaient voter. Le tout a été fait bénévolement, sans rétribution, a assuré l'ex-syndicaliste. «C'était vraiment du bénévolat.»

L'aide de la FTQ-Construction ne s'est pas limitée aux circonscriptions d'André Boisclair et François Rebello, mais étendue à toute la province, a précisé le témoin.

Contre-interrogatoire musclé

Plus tôt lundi matin, Jocelyn Dupuis a été durement contre-interrogé devant la commission Charbonneau. Talonné par un avocat sur les dossiers qu'il a recommandés au Fonds de solidarité FTQ, l'ex-syndicaliste a été incapable de nommer un seul entrepreneur n'entretenant pas de lien avec le crime organisé.

Lors de sa dernière journée de témoignage, Jocelyn Dupuis a notamment été contre-interrogé par Me Denis Houle, qui représente l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. Celui-ci a été particulièrement incisif à l'endroit du témoin.



«À part vos amis mafieux ou Hells, avez-vous déjà eu des clients honnêtes?» a lancé l'avocat. «Pour moi, c'était toutes des personnes honnêtes», s'est borné à répondre Jocelyn Dupuis. 

Me Houle s'est ensuite indigné des primes de départs versés par la FTQ-Construction pour tenter d'étouffer les scandales entourant le témoin. Le syndicaliste Ken Pereira, qui a révélé les somptueuses allocations de dépenses de Jocelyn Dupuis, a reçu 400 000$ tandis que le témoin a lui-même reçu 159 000$ à son départ. «Vous ne trouvez pas que ça s'est fait sur le dos des travailleurs? Vous n'avez pas de commentaires parce que ce n'est pas défendable?» a lancé l'avocat.

Me Houle est également revenu sur les cadeaux que Jocelyn Dupuis a reçus alors qu'il était à la tête de la FTQ-construction. L'avocat a longuement insisté sur le condo du 1000, rue de la Commune dont l'entrepreneur Joe Borsellino lui avait fourni une clé pendant près de trois ans. «Oui, mais je n'avais aucune exclusivité. C'est un échange entre amis qui n'a aucun rapport avec mes fonctions», s'est défendu le témoin. Jocelyn Dupuis a ajouté qu'il aurait pu prêter en échange son motorisé à Borsellino s'il lui avait demandé, soulignant que son véhicule valait autant que le condo.

Durant le contre-interrogatoire du Parti québécois, Jocelyn Dupuis a tenu à défendre son passage à la FTQ-Construction, assurant avoir toujours eu à coeur le sort de ses membres. «Est-ce que vous n'avez pas trahi la confiance des travailleurs que vous représentiez lorsque vous avez utilisé votre fonction pour obtenir des investissements du Fonds de solidarité ?» a demandé Me Estelle Tremblay. «Aucunement. J'ai tout fait pour représenter les travailleurs», s'est défendu le témoin.

Le témoignage de Jocelyn Dupuis terminé, l'entrepreneur Yannick Payette est maintenant à la barre. Son témoignage se déroule en non-publication, une requête d'interdiction de publication ayant été déposée pour empêcher les médias d'en diffuser le témoignage cet après-midi.

Yannick Payette était partenaire d'affaires de Louis-Pierre Lafortune dont le nom a souvent été mentionné à la commission Charbonneau. Celui-ci a été visé par une enquête de l'Agence du revenu du Canada pour évasion fiscale, selon Radio-Canada.