Un ex-vice-président au développement des affaires de la société de génie-conseil Roche, Gilles Cloutier, a affirmé hier que cette firme a versé 100 000$ à Frank Zampino pour financer la première campagne électorale d'Union Montréal, en 2001.

M. Cloutier a de plus affirmé hier que M. Zampino, qui est alors le maire de Saint-Léonard, lui a montré une liste de cinq autres firmes de génie à qui le même montant aurait été réclamé: ces firmes sont BPR, Cima", Genivar, SNC-Lavalin et Dessau.

C'est la première fois, à la commission Charbonneau, qu'un témoin parle de financement illégal pour le parti de l'ex-maire Gérald Tremblay lors de sa première campagne électorale.

Selon M. Cloutier, les premiers contacts ont eu lieu en mai 2001 lors d'une soirée de financement du Parti liberal du Québec pour la circonscription de Lafontaine, dans le nord de Montréal. MM. Tremblay et Zampino assistaient à la soirée.

«Gérald me dit: «Gilles, vas-tu nous donner un coup de main pour la campagne?» Il savait ce que je faisais. Il m'a mentionné que Frank me rappellerait dans les jours qui suivent.»

Quelques jours plus tard, M. Cloutier rencontre M. Zampino à son bureau de l'hôtel de Ville de St-Léonard. «Il me dit: ça nous prend 100 000$ de ta firme. J'ai été surpris du montant, je m'attendais à 25 000$.»

Après avoir consulté Marc-Yvan Côté, au bureau de Roche, à Québec, M. Cloutier rencontre une deuxième fois Frank Zampino en compagnie de M. Côté. Après discussion, Roche accepte de verser la somme demandée en quatre versements.

Pas de contrat

Mais dans les mois qui suivent les élections municipales de 2001, qui portent Gérald Tremblay à la mairie et Frank Zampino à la présidence du comité exécutif, Roche n'obtient pas de mandats de la Ville.

Une rencontre est demandée au bureau de Gérald Tremblay. MM. Cloutier et Côté font valoir que Roche «a aidé financièrement» la campagne, sans mentionner le montant de 100 000$. M. Tremblay fait venir «Frank», qui leur promet des nouvelles dans les jours suivants.

Selon M. Cloutier, c'est ainsi qu'une des filiales de Roche, la firme Evimbec, spécialisée en évaluation municipale, obtiendra un important montant d'assistance pour des dossiers d'évaluation contestés, «comme le Centre Bell et d'autres grosses firmes qui ont des bâtisses à Montréal».

Tremblay contredit

Le témoignage de M. Cloutier contredit de manière flagrante des déclarations de Gérald Tremblay faites lundi à la Commission. Interrogé sur ses liens avec Gilles Cloutier, l'ex-maire avait en effet nié l'avoir rencontré à son bureau de l'hôtel de ville et a aussi nié lui avoir jamais demandé un coup de main aux élections de 2001.

Le témoignage de M. Cloutier porte aussi ombrage à l'ancien maire d'une autre façon: il ajoute de la crédibilité au récit de l'ancien organisateur d'Union Montréal, Martin Dumont, qui avait affirmé en octobre que Gérald Tremblay était présent lors d'une discussion portant sur l'existence d'une double comptabilité des dépenses électorales à Union Montréal.

Cette allégation de Martin Dumont a forcé Gérald Tremblay à démissionner de la mairie une semaine plus tard, même s'il a nié l'événement, à l'époque, et encore devant la commission, lundi.

M. Cloutier a en effet identifié le document produit lors du témoignage de Martin Dumont comme un «double budget», semblable à ceux qu'il produisait lui-même quand il organisait des élections.

Gilles Cloutier a fait la même interprétation du document que M. Dumont, qui présente deux colonnes de chiffres. La première représenterait le montant des dépenses autorisées en vertu de la loi, et la seconde, le montant réel que prévoyait dépenser Union Montréal lors d'une élection partielle, en 2004.

M. Cloutier, qui a donné «un coup de main» pour un week-end lors de cette élection, a affirmé qu'il a vu des «bénévoles» qui recevaient des enveloppes d'argent comptant, lors de son passage au local électoral d'Union Montréal.

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Frank Zampino