Le président de la firme de génie-conseil BPR, Pierre Lavallée, a reconnu hier que son entreprise a versé entre 145 000$ et 155 000$ en argent comptant à la caisse occulte du parti de l'ex-maire Gérald Tremblay afin d'obtenir cinq contrats de la Ville de Montréal, en 2007 et en 2008.

M. Lavallée a qualifié hier de «honteux» et de «dégradant» ce court épisode de l'histoire de la firme, qui n'avait jamais fait face à une telle situation, selon lui. Les sommes d'argent ont été rassemblées à partir des contributions directes des associés, tirées de leur propre compte en banque.

La Commission a d'ailleurs produit des relevés de transactions démontrant que M. Lavallée avait fait, aux périodes correspondantes, plusieurs retraits de 9000$ en argent comptant de son compte pour payer les sommes dues au parti Union Montréal et à son responsable du financement, Bernard Trépanier.

«On a été naïf, a-t-il dit hier à la commission Charbonneau, mais on l'a fait. Ils ont des moeurs spéciales [à la Ville de Montréal] et on va vivre avec. J'ai pas d'autres explications. C'est pas intelligent, mais...»

Même procédé

Après les témoignages de François Perreault, un ex-vice-président de Genivar, et d'Yves Cadotte, vice-président principal de SNC-Lavalin, qui ont aussi reconnu avoir contribué à un système de collusion sur les contrats d'ingénierie dirigé par M. Trépanier, M. Lavallée a confirmé que BPR était informée d'avance au sujet des contrats qu'elle obtiendrait. Elle a aussi accepté de faire des consortiums avec d'autres firmes (le Groupe Séguin et CIMA+) pour mettre la main sur ces contrats, qui ont rapporté 5,2 millions à l'entreprise.

M. Lavallée a aussi tenu exactement le même discours que MM. Perreault et Cadotte relativement aux dons généreux faits par des ingénieurs et des cadres de BPR aux partis politiques provinciaux. Selon un relevé rendu public hier par la Commission, des employés de BPR ont versé près de 320 000$ au Parti libéral du Québec (PLQ), un peu plus de 200 000$ au Parti québécois (PQ) et 42 420$ à la défunte Action démocratique du Québec, pour un total de 564 490$ de dons entre 1998 et 2010.

Contrairement aux deux témoins précédents, M. Lavallée a soutenu que BPR n'a pas remboursé ces cotisations aux employés qui y consentaient.

Initiatives des partis

Selon lui, ces contributions politiques étaient demandées, annuellement, par les responsables du financement du PLQ et du PQ, et n'ont pas été versées en échange d'un contrat ou d'informations privilégiées permettant de mettre la main sur un mandat gouvernemental.

Comme MM. Perreault et Cadotte avant lui, il a ainsi nié tout lien entre les dons politiques des employés et les contrats totalisant 158 millions que BPR a obtenus du ministère des Transports du Québec au cours de cette période.

Un graphique décrivant l'évolution de ces dons, publié aussi par la Commission, démontre clairement que les contributions au PLQ ont fortement augmenté à compter de 2002, soit l'année précédant l'arrivée du gouvernement de Jean Charest, élu en avril 2003. Les dons politiques faits par les cadres et les employés de Genivar et de SNC montraient sensiblement les mêmes tendances.