L'ancien numéro deux de la Ville de Montréal Frank Zampino aurait reçu des faveurs d'une valeur de 550 000$ de la part de Paolo Catania, dirigeant de Constructions F. Catania, pour son rôle dans la vente des terrains du projet Faubourg Contrecoeur, dans l'est de la métropole.

C'est ce qu'a affirmé hier, à la commission Charbonneau, Elio Pagliarulo, ancien ami et partenaire d'affaires de M. Catania dont les relations avec l'entrepreneur de la Rive-Sud ont mal tourné en 2009.

M. Pagliarulo, qui a des dettes de plus de 1,3 million envers Paolo Catania et son père Frank, aurait été enlevé par deux inconnus et battu durant trois heures, le 1er août 2009. Il a porté plainte à la police. Des accusations de menaces, de harcèlement et de tentative d'extorsion ont été portées contre Paolo Catania. Les accusations ont été abandonnées un an plus tard.

Hier, M. Pagliarulo a dit à la Commission qu'il a lui-même livré les trois paiements de 100 000$ en espèces à M. Catania dans un club privé, en 2006. La première fois, M. Catania était seul et ne lui a rien dit au sujet de la destination finale de cet argent. La deuxième fois, M. Pagliarulo a aperçu l'ancien bras droit du maire Gérald Tremblay dans une pièce attenante. La troisième fois, à l'occasion d'une fête, M. Zampino est passé quelques minutes avec sa femme, et M. Pagliarulo leur a même brièvement parlé. C'est M. Catania qui avait fait les présentations.

L'homme d'affaires, qui a été propriétaire des Pâtisseries Pagel et qui a déjà employé jusqu'à 235 personnes, a ajouté que M. Catania lui avait aussi dit que des travaux de rénovation de 250 000$ avaient été réalisés par l'entreprise de M. Catania dans la cuisine de la résidence privée de M. Zampino.

De plus, M. Pagliarulo a affirmé que M. Catania lui aurait demandé à plusieurs reprises d'apporter des enveloppes d'argent contenant de 5000$ à 25 000$ afin de «payer» pour les sommes qu'il recevait en «extra» sur les contrats réalisés pour la Ville de Montréal.

En plus de fonctionnaires et de surveillants qui touchaient des pots-de-vin, l'homme d'affaires a nommé un élu qui y aurait aussi eu droit: Frank Zampino.

Prêts usuraires

M. Pagliarulo connaissait M. Catania depuis de nombreuses années quand ils se sont associés dans une entreprise de prêts usuraires, à la fin des années 90. Les activités de cette entreprise étaient, évidemment, illégales. Il a déjà prêté jusqu'à 5 millions par l'entremise de cette entreprise, qui a été plombée à compter de 2007 par de mauvaises créances de trois emprunteurs, qui ont quitté le pays. Les dettes accumulées auprès de Paolo et de Frank Catania dans les activités de prêts usuraires ont mené aux événements de 2009 et à la fin de ses relations avec ses ex-partenaires.

Mais durant plusieurs années, affirme l'ancien propriétaire des Pâtisseries Pagel, les deux hommes partageaient une grande complicité.

À propos de M. Zampino, M. Pagliarulo a déclaré qu'il ne l'avait jamais remarqué dans l'entourage de M. Catania avant le dossier du Faubourg Contrecoeur. L'immense terrain de 38 hectares appartenant à la Ville de Montréal a été vendu pour seulement 4,3 millions au promoteur immobilier Paolo Catania, en 2007. Le coût de la transaction était de 19 millions, mais une somme de 11 millions a été retranchée pour la décontamination des terrains et 3 millions ont aussi été soustraits pour une prétendue perte d'usage causée par des travaux de dynamitage à proximité.

Selon M. Pagliarulo, Paolo Catania lui aurait affirmé «que le terrain valait environ 50 millions à lui seul et qu'avec ce projet immobilier, il allait faire des profits de 80 millions en 10 ans».

Paolo Catania, Frank Zampino, son ancien bras droit Martial Filion, Bernard Trépanier, responsable du financement pour le parti du maire Gérald Tremblay, ainsi que Daniel Gauthier, urbaniste de la firme de génie-conseil Dessau, ont été arrêtés pour fraude, complot et abus de confiance relativement à l'affaire du Faubourg Contrecoeur, le 17 mai dernier.