Les enquêteurs de la commission Charbonneau ont tenu récemment plusieurs rencontres avec des syndicats de la construction, mais en l'absence d'acteurs de taille: la FTQ-Construction et l'International, les deux plus grandes centrales, dont les membres ont perturbé des chantiers l'automne dernier.

À l'approche des audiences publiques de la commission d'enquête sur l'industrie de la construction, les enquêteurs et les procureurs voulaient en apprendre plus sur le milieu.

Selon ce qu'a appris La Presse, ils ont noté avec intérêt que certains syndicats sont plus réticents que d'autres à les rencontrer.

La CSN-Construction et la CSD-Construction ne se sont pas fait prier pour collaborer. Les deux organisations prétendent que leurs membres sont parfois victimes de discrimination et réclament depuis la première heure une enquête publique.

«Nous avons eu deux rencontres déjà. Depuis le temps qu'on demandait une commission, c'était logique. Nous croyons que tout n'est pas tout à fait catholique dans l'industrie, à en croire le témoignage de nos ouvriers et de nos représentants», affirme le président de la CSN-Construction, Aldo Miguel Paolinelli.

Une quarantaine de délégués

«On est en action avec les gens de la Commission et on en est fiers!», renchérit Patrick Daigneault, président de la CSD-Construction, qui a participé à cinq rencontres avec les enquêteurs. Lors d'une de ces réunions, une quarantaine de délégués syndicaux s'étaient déplacés et plusieurs ont témoigné de leur expérience dans les chantiers.

«C'était très intéressant. Leur mandat était clair et ils avaient préparé un document pour nous. On leur donne un coup de main parce qu'on veut le portrait de la collusion, de la corruption, de la discrimination et de l'intimidation», dit-il.

Le Conseil provincial des métiers de la construction (International) et la FTQ-Construction, qui regroupent pourtant la majorité des travailleurs de l'industrie, n'ont pas été rencontrés. Des militants de ces deux centrales avaient perturbé les chantiers pour protester contre l'abolition du placement syndical l'automne dernier.

Leurs dirigeants sont à couteaux tirés avec la ministre du Travail, Lise Thériault, et la présidente de la Commission de la construction du Québec (CCQ), Diane Lemieux. Le gouvernement a d'ailleurs récemment retiré le président de l'International du conseil d'administration de la CCQ en raison de ses propos «empreints d'intimidation et de violence», enregistrés par l'émission J.E.

Pas certains d'y aller

Par la voix de leur porte-parole, les dirigeants de l'International confirment avoir été invités à rencontrer les enquêteurs, mais ils disent étudier avec leur avocat les modalités et la forme que pourraient prendre ces rencontres. Ils n'ont pas encore décidé de la marche à suivre.

Mais qu'ils participent ou non aux rencontres privées avec les enquêteurs, ils disent avoir la ferme intention de se faire entendre aux audiences publiques de la commission.

Quant à la FTQ-Construction, son porte-parole Mathieu Morin affirme qu'elle n'a jamais été invitée à des rencontres préliminaires, contrairement aux autres syndicats. Il ignore pourquoi la Commission aurait invité tout le monde sauf la plus grande centrale.

Les anciens dirigeants de la FTQ-Construction ont été passablement malmenés dans les médias récemment, notamment en raison des accusations de fraude portées contre l'ancien directeur général Jocelyn Dupuis et de ses liens avec des gens associés au crime organisé.

Le porte-parole de la commission, Richard Bourdon, n'a pas voulu commenter les démarches préliminaires. «Jusqu'aux audiences publiques, on ne fera aucun commentaire sur l'avancement des travaux», dit-il.

Les audiences publiques de la commission Charbonneau doivent commencer ce mois-ci.