Jean Charest a-t-il oui ou non ordonné à Marc Bellemare de se plier aux exigences des collecteurs de fonds dans la nomination des juges? Le mystère reste entier. Michel Bastarache soutient ne pas avoir à trancher cette question délicate pour déterminer que les allégations de l'ancien ministre libéral ne tiennent pas la route.

L'ancien magistrat à la Cour suprême n'a pas jugé utile d'établir si le face-à-face crucial entre Marc Bellemare et Jean Charest a vraiment eu lieu le 2 septembre 2003 au bureau du premier ministre.

Me Bellemare l'avait inscrite à son agenda, copié sur une disquette retrouvée in extremis à la fin des audiences publiques. Il n'y a pas de mention de cette rencontre à l'agenda du premier ministre, où l'on consigne ces rendez-vous une fois qu'ils ont été confirmés - ce qui était le cas.

Dans son témoignage, Me Bellemare n'avait pas parlé de sa présence à une réunion du comité de direction de Vanier le même soir. Sa présence est consignée aux procès-verbaux. Il soutient avoir quitté la réunion tout de suite après son allocution pour se rendre au bureau de M. Charest. Le procès-verbal ne fait pas état de son départ, contrairement à d'autres occasions.

Selon M. Bellemare, c'est à cette rencontre que l'ordre incontournable est tombé: «Franco c'est un ami personnel, un collecteur influent du parti, aurait dit M. Charest. On a besoin de ces gars-là. Il faut les écouter. C'est un professionnel du financement. S'il t'a dit de nommer Bisson et Simard, nomme-les.»

Or, non seulement Jean Charest nie avoir jamais tenu de tels propos, mais il soutient même que cet entretien n'a jamais eu lieu.

«La preuve est entièrement contradictoire», observe Michel Bastarache.

Il contourne la question. Rencontre ou pas, la prépondérance de la preuve, pour l'ensemble du dossier, contredit les accusations portées par Me Bellemare, selon lui. Au surplus, ces contradictions sont au centre des litiges actuellement devant les tribunaux - MM. Bellemare et Charest se poursuivent mutuellement en diffamation. En tirant une conclusion, la Commission choisirait une version et influencerait le tribunal, explique le commissaire.