Les trois juges concernés par les allégations de Marc Bellemare continueront à siéger pendant les audiences de la Commission d'enquête publique sur le processus de nomination des juges, qui devraient durer six semaines.

«Les travaux de la commission Bastarache n'ont aucun impact sur le fonctionnement de la Cour du Québec, dont les activités régulières se poursuivent normalement», a indiqué hier Me Renée Desrosiers de Lanauze, adjointe par intérim de la juge en chef de la Cour du Québec, Élizabeth Corte.

Hier, l'ancien ministre de la Justice Marc Bellemare a affirmé devant la commission Bastarache qu'il avait fait l'objet de pressions pour nommer les juges Marc Bisson, Line Gosselin-Després et Michel Simard. M. Bisson est coordonnateur adjoint de la Cour du Québec à Longueuil tandis que Line Gosselin-Després et Michel Simard siègent au palais de justice de Québec.

Les procureurs de la Couronne entendent continuer à plaider devant eux, a indiqué Annie-Claude Bergeron, porte-parole du Directeur des poursuites criminelles et pénales. «Leur impartialité et leur compétence ne sont pas remise en question», a dit Me Bergeron, elle-même procureure de la Couronne.

Pas de commentaire

L'affaire Marc Bellemare semble être un sujet délicat dans le monde juridique québécois: hier, le Barreau du Québec et le Conseil de la magistrature ont refusé de se prononcer sur les déclarations incendiaires de l'ex-ministre la Justice.

Même silence du côté des trois juges mis en cause: Michel Simard et Marc Bisson n'ont pas rappelé La Presse, et l'adjointe de Line Gosselin a répondu qu'elle ne ferait aucun commentaire.

Photo: Archives La Presse

Promu juge en chef adjoint à la Chambre civile de la Cour du Québec le 5 novembre 2003. Était déjà juge à la Cour du Québec lors de sa promotion. «Je n'ai rien à dire contre Michel Simard, qui est un juge d'expérience, qui pratique un droit impeccable, il a une belle notoriété. Il avait de bons arguments pour (lui)», a dit hier Me Bellemare, après avoir expliqué qu'il aurait préféré promouvoir un autre juge, Claude Chicoine.

Le directeur du Centre de recherche en droit public (CRDP) de la faculté de droit de l'Université de Montréal, Karim Benyekhlef, n'a pas souhaité non plus discuter des cas précis qu'a évoqués Marc Bellemare. Il a toutefois souligné que le processus de nomination des juges au Québec s'est grandement amélioré au fil des ans. Depuis les années 70, explique-t-il, un comité multipartite est chargé d'évaluer les candidatures et de faire ses recommandations au ministre de la Justice.

«À ma connaissance, l'immense majorité des juges de la Cour du Québec sont indépendants et impartiaux», estime M. Benyekhlef, qui souligne que le processus de nomination au Canada est beaucoup moins politisé qu'aux États-Unis.

Le professeur explique qu'il est pratiquement impossible de déloger un juge, qui est nommé jusqu'à la retraite ou jusqu'à l'âge de 75 ans. «Les juges ne sont donc redevables à personne», dit-il.

«Est-ce que le mécanisme aurait besoin d'ajustements? C'est ce que va nous dire sans doute la commission Bastarache, dit Karim Benyekhlef. À la lumière des quelques faits que je connais, je crois qu'il y a peut-être quelques petits ajustements qui peuvent être apportés pour rassurer la population.»

Photo: Archives La Presse

Nommé le 26 novembre 2003 à la Cour du Québec, chambre criminelle. Fils de Guy Bisson, un organisateur libéral de l'Outaouais. Me Bisson faisait partie de la courte liste retenue par le comité indépendant chargé d'analyser les candidatures. Guy Bisson a reconnu avoir parlé avec Norman MacMillan, député de Papineau, pour que son fils accède à la magistrature en 2003. M. MacMillan était à l'époque président du caucus des députés libéraux. Il assistait à ce titre aux réunions du Conseil des ministres.