Pour un Afghan, Mohammad Shafia mérite une note de 8,5 sur 10 sur l'échelle du libéralisme.

C'est l'un des enfants survivants de Mohammad Shafia, plus précisément son deuxième fils, qui a fait et répété cette affirmation devant le jury cette semaine, à Kingston.

Mohammad Shafia est un homme d'affaires de très bonne réputation, discipliné, honnête, et qui dit toujours la vérité.

Ce sont deux Afghans d'origine qui ont affirmé cela à la barre des témoins, hier: Jawad Hoayon, frère aîné de Tooba, qui réside maintenant en Allemagne, et Abdul Rahim Ananzay, résidant de Toronto, qui a été associé en affaires avec Mohamad Shafia.

C'est avec ces trois témoins que Me Peter Kemp, avocat de Mohammad Shafia, a clos sa défense, hier, dans le procès pour quadruple meurtre qui implique aussi la deuxième femme de Mohammad, Tooba, et leur fils aîné, Hamed. Les trois sont accusés des meurtres prémédités de trois des filles Shafia et de la première femme de Mohammad, qui ont été trouvées noyées le 30 juin 2009, à Kingston Mills.

Beau portrait

Le vertueux portrait tracé par les trois derniers témoins n'a pas manqué de faire réagir les procureurs de la Couronne. «Vous avez parlé de la bonne réputation de Mohammad Shafia en affaires. Mais est-ce que vous avez discuté du fait qu'après la mort de ses filles, il les a traitées de putains? Avez-vous discuté du fait qu'il frappait ses filles, qu'elles avaient peur de lui? Qu'il frappait sa première femme, Rona?», a pilonné Me Laurie Lacelle, en s'adressant à M. Ananzay. «Non, on ne discutait pas de choses personnelles», a répondu le témoin.

En ce qui concerne le deuxième fils des Shafia, qui avait 15 ans lors de la tragédie, il a passé deux jours et demi dans le box des témoins. Avec aplomb, il a soutenu que son père n'était pas l'homme violent et intransigeant décrit depuis le début du procès.

Le hijab? Non, il n'a jamais vu ses soeurs le porter. Elles pouvaient s'habiller comme elles le voulaient, a-t-il assuré.

Il a minimisé ou démenti tout ce que ses soeurs et lui avaient dit de négatif au sujet de leur père et d'Hamed.

Questionné abondamment sur le fameux voyage à Niagara, en juin 2009, le fils s'en est tenu à la version des accusés, y compris les flous stratégiques. Personne, chez les quatre membres de la famille Shafia dont on a entendu la version jusqu'ici, ne sait où la Nissan s'est arrêtée, tôt dans la nuit du 30 juin 2009, pour attendre pendant que Mohammad et Hamed sont partis dans la Lexus trouver un motel. «C'était dans un stationnement, il faisait noir, il y avait une route, il y avait la 401, c'était dans la ville, c'était en dehors de la ville...»

La Couronne, elle, est persuadée que cet endroit était le lieu historique des écluses de Kingston Mills. C'est là que la Nissan contenant les quatre victimes a été trouvée quelques heures plus tard.

Procès ajourné

Le témoignage du fils s'est conclu sur une note amère, hier. Au moment de quitter le box, le jeune homme s'est tourné vers le juge et lui a demandé s'il pouvait aller étreindre ses parents dans le box des accusés avant de partir, ce qui a fait bondir Me Laarhuis.

«Cela a déjà été discuté. Ce n'est pas le moment», a déclaré le procureur. Un peu surpris, le juge a indiqué que ce n'était effectivement pas le moment. Tooba a alors éclaté en sanglots. Mohammad s'est mis à pleurer lui aussi, et même Hamed, d'ordinaire impassible, semblait sur le point de pleurer. Le témoin, qui n'avait pas versé une larme depuis le début, est sorti en s'essuyant les yeux.

Le procès de Mohammad Shafia, 59 ans, de sa femme Tooba, 42 ans, et de leur fils Hamed, 20 ans, qui est sur les rails depuis la mi-octobre, a été ajourné et reprendra le 9 janvier. Rappelons que les trois Shafia sont accusés des meurtres prémédités des soeurs Zainab, 19 ans, Sahar, 17 ans, Geeti, 13 ans, et de Rona, 53 ans, première femme de Mohammad.