Dans les semaines précédant le jour où Guy Turcotte a tué ses enfants, il était dans une grande détresse émotionnelle. M. Turcotte présentait les symptômes d'une maladie mentale majeure, soit un trouble d'adaptation avec anxiété et humeur dépressive, mais ne semblait pas s'en rendre compte.

C'est ce qui se dégage, entre autres, du rapport d'expertise que la psychiatre Dominique Bourget a réalisé en 2011, à l'égard de M. Turcotte. Le mandat donné à la Dre Bourget était de se faire une opinion sur l'état mental de M. Turcotte. Ce dernier admet avoir tué ses enfants le 20 février 2009, dans un contexte de séparation d'avec sa conjointe. Mais ses avocats soutiennent qu'il ne devrait pas être trouvé responsable, en raison du trouble mental qu'il l'affectait. C'est à la défense de le démontrer, et c'est dans ce cadre que la Dr Bourget est appelée comme témoin. 

Documentation

Pour se faire une idée, la psychiatre a pris connaissance de la documentation relative au dossier, et a rencontré M. Turcotte à deux reprises, soit le 14 janvier 2010 et le 19 mars 2010. Elle se rappelle qu'il parlait beaucoup. Il était alors incarcéré au Centre de détention de Rivière-des-Prairies. Le rapport qu'elle a rédigé a été remis au jury, mercredi. 

Le document de 29 pages relate notamment l'histoire de vie de M. Turcotte, détaille sa relation conjugale avec Isabelle Gaston, ainsi que le contexte de leur séparation, et donne la version de M. Turcotte des événements. On y trouve aussi les conclusions de la psychiatre, mais cet aspect n'a pas encore été abordé devant le jury.

Mme Bourget est psychiatre au Centre de santé mentale Royal d'Ottawa, affilié à l'université où elle est aussi professeur. Au procès, elle témoigne à titre d'experte en psychiatrie légale. En avant-midi, elle a donné des détails de son C.V. qui fait 47 pages. Elle a aussi parlé du rapport, notamment en reprenant les définitions du glossaire qui y est annexé. En après-midi, elle a repris des pans de la preuve qui ont été présentés au jury, pour expliquer ce qui, selon elle, était l'état mental de M. Turcotte. Elle estime que même s'il continuait de fonctionner au travail, M. Turcotte était malade mentalement et souffrait. Un cerveau peut être malade, comme tous les autres organes. À la différence que cette souffrance n'est pas visible pour les autres, comme le serait un cancer, par exemple. La Dre Bourget poursuivra son témoignage jeudi.

Extrait du rapport de la Dre Bourget 

«Avec le cumul d'éléments de stress importants, un tableau dépressif s'est installé. À l'histoire, on note la présence de symptômes de sentiments de tristesse et d'abandon, découragement, pleurs fréquents, crise d'angoisse... Il se sentait «stressé» mais semble avoir eu peu conscience par ailleurs de la détérioration de son état mental et de sa grande vulnérabilité. Il n'est pas rare que les individus qui souffrent de dépression aient peu conscience de la gravité de leur état, surtout dans les premiers temps».