Guy Turcotte était le bouc émissaire de ses camarades à la petite école. Ça allait mieux à l'école secondaire, mais il n'a jamais eu une grande confiance en lui. Isabelle Gaston, elle, était enjouée et sûre d'elle. Il en est tombé amoureux dès leur première rencontre, en 1999, mais leurs nombreuses chicanes l'ont incité à mettre fin à leur relation, en 2001.

C'est d'une voix monocorde, les yeux constamment baissés vers le sol, que Guy Turcotte a entrepris son témoignage ce matin, à son procès pour les meurtres de ses enfants. Vêtu d'un complet gris froissé, l'homme de 43 ans a raconté sa vie, à la demande de son avocat, Me Pierre Poupart. Il est le 3e d'une famille de six enfants. Son père était monteur de lignes chez Hydro-Québec, puis répartiteur par la suite. Sa mère était puéricultrice avant d'avoir elle-même des enfants. Il a grandi à Saint-Hubert, a été sauveteur en natation, et a commencé ses études en médecine à Québec, en 1991. Il a connu Isabelle Gaston lors d'un 5 à 7 dans un bar de Québec, en 1999. Elle étudiait en médecine également. Il a tout de suite été séduit par cette belle fille pleine d'assurance. Ils ont fait vie commune, mais la relation était houleuse. Ils se chicanaient souvent. «Ses manifestations de colère ça sortait fort, et elle déversait ça un peu sur moi», a-t-il dit. 

En 2001, il est allé seul dans un congrès de médecine en Floride. Il n'a pas appelé Isabelle de la semaine, car il réfléchissait à leur relation. Isabelle était fâchée de ne pas avoir eu de nouvelles et elle le lui a fait savoir à son arrivée «Elle m'a insulté. Je lui ai donné une claque, et j'en ai reçu une aussi vite. Je lui ai dit: je ne veux plus rien savoir.»

Ils se sont séparés, et Guy Turcotte s'est pris un autre appartement. En juillet de la même année, Isabelle est venue lui porter des effets personnels. Elle est arrivée au moment où il était «triste, en phase down, en peine d'amour.» Il l'a invitée à prendre un café, et la relation a repris. «Elle m'a dit qu'elle s'était rendu compte qu'elle m'aimait et qu'elle était prête à s'engager.»

Isabelle Gaston l'a informé à ce moment-là qu'elle avait été enceinte avant leur rupture. Elle ne lui avait pas dit, car elle ne voulait pas qu'il reste avec elle juste pour ça. «Elle m'a dit qu'elle s'était fait avorter.»

C'est la première fois que cet arrêt de grossesse est dévoilé publiquement. M. Turcotte lui-même n'en avait pas parlé lors du premier procès. «Isabelle ne voulait pas qu'on en parle, mais quand j'ai entendu son témoignage, je me suis dit que ce n'était pas comme ça que ça s'est passé. Je vais remettre les pendules à l'heure», a-t-il fait valoir.

Isabelle était maintenant plus prête à s'engager. Guy Turcotte a raconté avec émotions leurs fiançailles lors d'une randonnée au mont Washington. Il avait apporté du champagne, et une bague. Elle a dit oui. «C'était super romantique. On était seuls. On a pris des photos, le soir au restaurant, je lui ai donné sa bague», a-t-il expliqué avec émotion.

En 2003, ils sont venus s'établir dans la région de Saint-Jérôme, car Guy avait trouvé un emploi de cardiologue. Isabelle n'avait pas tout à fait terminé ses études de médecine quand elle est devenue enceinte d'Olivier, qui naîtra en avril 2003. 

M. Turcotte poursuit son témoignage. 

Ce matin, Me Pierre Poupart a annoncé qu'il allait présenter une défense de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. Des experts viendront témoigner.