«Le jury a rendu un verdict de son mieux. Ils étaient 11, le procès a duré trois mois, ils ont été là de A à Z et ils ont fait le travail qu'ils avaient à faire.»

«Non, je ne suis pas d'accord. Comment peut-on tuer ses deux enfants et ne pas être puni pour son geste? Ça n'a pas de sens.»

Le jury qui a déclaré Guy Turcotte criminellement non responsable du meurtre de ses deux enfants a-t-il rendu une décision trop clémente? Le temps d'une pause café, Pierre Forget et Daniel Lachance incarnent un débat qui fait rage dans bien des chaumières du Québec depuis mardi soir.

Sauf que les deux hommes sont employés de cuisine à l'hôpital de Saint-Jérôme, où travaillait Guy Turcotte comme cardiologue, et où il a été transporté après avoir tenté de se suicider en ingurgitant du lave-glace. Le sujet est particulièrement délicat entre les murs de l'hôpital, si l'on se fie aux nombreux refus auxquels La Presse s'est heurtée, hier, quand elle a demandé des commentaires.

Réfugiés sous un petit toit pour se protéger de la pluie, les deux employés sont parmi les rares qui ont accepté de discuter ouvertement du dénouement de l'affaire Turcotte.

«On parle d'un homme qui va aller à Pinel et qui risque d'en sortir dans 45 jours. Ça n'a pas de sens», dit Daniel Lachance.

«Mais il fallait qu'il soit dérangé pour commettre ce geste-là. Personne ne fait cela à ses deux enfants. Lui, il est jugé sur le fait du moment. Ils l'ont déclaré malade dans la tête à ce moment-là, et c'est tout», riposte Pierre Forget.

Sandra, employée du bloc opératoire, avait déjà croisé Guy Turcotte dans le cadre de son travail. Il était également le médecin de son conjoint.

«C'est sûr que ce n'est pas la même personne aujourd'hui que celle que l'on côtoyait, dit-elle. Personnellement, je ne suis pas d'accord avec la décision. Ici, les gens le prennent mal. Quand il y a des enfants en jeu, c'est toujours comme ça.»

«Dès que le verdict est tombé, tout le monde s'est mis à en parler. Il y en a qui trouvent que c'est épouvantable et qu'il devrait aller en prison, et d'autres qui sont d'avis qu'il a besoin de soins psychologiques», a ajouté une infirmière externe, Amélie Fleury Larocque. «Les opinions sont très partagées.»

Selon sa collègue Hélène Casavant, également infirmière externe, la société a peut-être tendance à juger les gens trop facilement, sous le coup de l'émotion. «On voit le meurtre de deux enfants et on se dit que c'est inacceptable, mais nous n'avons pas devant nous toute la preuve faite en cour. De toute façon, le verdict est tombé et je crois qu'il est temps de s'incliner. Il faut se fier aux 11 jurés qui ont fait leur travail.»